Au cours de ces deux derniers mois, le pays a enregistré deux meurtres, dont le plus récent est celui de Djamlati Hassani, mère de famille. L’auteur a certes avoué son crime et se trouve en détention après avoir été arrêté le même jour par les forces de l’ordre, mais la psychose est toujours là chez la population.
Face à cette recrudescence des actes criminels, certains citoyens appellent à recourir à la peine de mort contre les auteurs. Une façon, selon eux, de dissuader les criminels. «Aujourd’hui, on tue comme on respire», déplore Bacar Abdou. Ce commerçant va jusqu’à réclamer la peine capitale qui, rappelons-le, est toujours en vigueur dans notre pays. «Celui qui enlève une vie doit payer de la même manière car il n’est plus un être humain. La peur de mourir pourrait dissuader bien des criminels », croit-il.
Comme Bacar, de nombreux citoyens interrogés par Al-watwan plaident pour la même méthode, citant parfois la sharia. «Je suis pour, parce qu’enfermer les meurtriers, les nourrir, les loger, ça ne suffit plus. Selon l’islam, celui qui tue doit être tué», martèle Saïd Moibiwa, plus connu sous le surnom de Vidjay, convaincu de l’effet dissuasif de la peine de mort. «Quand la peine de mort était appliquée, les meurtres aveint diminué également», a-t-il dit. Il faut noter que ce n’est pas la première fois que la peine de mort s’invite dans le débat public.
Avec les récentes condamnations à mort prononcées le mois dernier à l’issue des audiences de la cour d’assises, le sujet a juste été relancé. D’autant plus que, selon des juristes, pour qu’un prévenu condamné à la peine capitale soit exécuté, le président de la République doit signer un décret précisant le mode d’exécution. «Moi, même si c’était ma mère, je serais pour la peine de mort. Tuer un être humain, c’est un acte irréversible. Il faut des sanctions à la hauteur», insiste Kadri Kennedy, chauffeur de taxi.
«Erreurs, manipulation…»
Mais d’autres voix restent sceptiques et restent opposés à l’application de la peine capitale. Ces derniers invoquent notamment l’état actuel de la justice comorienne. «Ce n’est pas que je sois opposé à la peine de mort en soi, mais je n’ai aucune confiance en notre système judiciaire. Il y a des cas de légitime défense, des erreurs possibles, des manipulations», note un citoyen ayant souhaité garder l’anonymat. Faika Abdou va dans le même sens : «Ce sont toujours les pauvres qui paient. Sans avocat, sans défense, ils sont les premières victimes d’une justice inéquitable. Tuer quelqu’un, ce n’est pas rendre justice, c’est prolonger le cycle de violence», pense-t-il.
Fait surprenant, certains religieux aussi appellent à la miséricorde. «Allah est Le pardonneur. Qui sommes-nous pour ôter une vie ? Il faut laisser une chance à chacun de se repentir. La culture comorienne valorise le dialogue, la médiation. Si on tue un innocent, qui répondra devant Dieu ?», s’interroge fundi Salim Dine, un maître d’école coranique rencontré au marché de volo-volo. Étudiante, Bacar Salma est pour la peine capitale mais seulement dans des cas extrêmes : «Les violeurs d’enfants, les trafiquants d’organes ou les meurtriers récidivistes sans remords ne devraient pas avoir de seconde chance. Ce n’est pas une vengeance, mais une nécessité de protection», énuméra-t-elle.