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Migrants retenus à Ndzuani I Un quotidien de plus en plus difficile, un sort incertain

Migrants retenus à Ndzuani I Un quotidien de plus en plus difficile, un sort incertain

Société | -   Sardou Moussa

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Au début de cette année, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés et le gouvernement du Lesotho ont en effet accordé à 28 d’entre ces migrants le statut de réfugiés, pouvant donc être accueillis dans ce pays. Mais si certains ont refusé cette destination (évoquant, entre autres raisons, la criminalité et le taux élevés du Vih-Sida), d’autres qui l’ont accepté et qui attendent depuis d’y être envoyés, sont toujours bloqués à Ndzuani et personne, ni du côté du gouvernement comorien, ni de celui du Hcr, ne semble avoir d’explication claire à leur fournir.

 

A leur interception par la gendarmerie fin septembre 2021, à Bambao-mtsanga dans l’île de Ndzuani, ils étaient 52. Hommes, femmes et enfants, venus pour la plupart de la République démocratique du Congo et du Burundi, et qui avaient pour destination finale l’île comorienne de Mayotte.

14 à Mayotte, 4 au Lesotho et 28 ayant obtenu le statut de refugiés

Placés depuis en «rétention administrative» dans des bâtiments initialement aménagés pour devenir une «Ecole nationale de police» à Trenani (mais qui n’ont à ce jour que très peu servi à cela), il en reste aujourd’hui 34. A travers trois évasions en groupes, 14 d’entre eux ont pu s’échapper et rejoindre Mayotte où, d’après des renseignements vérifiés, «ils sont libres de leur mouvement». Quatre autres sont partis au Lesotho, pays de la région qui dispose d’un camp de réfugiés.


Au début de cette année, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés et le gouvernement du Lesotho ont en effet accordé à 28 d’entre ces migrants le statut de réfugiés, pouvant donc être accueillis dans ce pays. Mais si certains ont refusé cette destination (évoquant, entre autres raisons, la criminalité et le taux élevés du Vih-Sida), d’autres qui l’ont accepté et qui attendent depuis d’y être envoyés, sont toujours bloqués à Ndzuani et personne, ni du côté du gouvernement comorien, ni de celui du Hcr, ne semble avoir d’explication claire à leur fournir. D’autres encore ont déposé des demandes de visas d’entrée à Mayotte pour aller rejoindre leurs familles, et sont en attente d’une réponse.


Toutefois, le quotidien de ces hommes, femmes et enfants devient chaque jour de plus en plus difficile. « L’on mange une fois par jour. Du riz, du poulet, des sardines... Ce que nous mangeons vient du Croissant-rouge ou de l’église [la mission catholique]. Certains d’entre nous ne mangent pas certains des aliments qui nous sont servis, mais il n’y a rien d’autre, donc ils restent avec leur faim. Nous ne pouvons pas communiquer avec l’extérieur. C’est très dur ici ! Il n’y a pas de droits de l’homme ici (sic) », nous a témoigné, sous anonymat, l’un d’eux.

Le sort réservé aux mineurs non-accompagnés

Ce quotidien s’est davantage compliqué depuis la dernière évasion. Le 21 avril dernier, à l’aube, alors qu’une pluie torrentielle et orageuse s’abattait sur l’île, 9 des ces migrants en ont profité pour s’échapper.Furieux, le directeur régional de la police a décidé de transférer les hommes et les femmes célibataires (qui n’ont donc personne pour les retenir de s’évader) dans les cellules du Commissariat central de la police (où sont normalement détenus des suspects en garde à vue), à Mutsamudu. Entassés dans une cellule de 10 mètres carrés, une dizaine d’hommes crient leur désarroi à quiconque passe par là : « Il y en a qui sont malades ici… C’est très dur ici… Il n’y a pas de droits de l’homme ici ? » La semaine dernière, une jeune femme (les femmes ont leur cellule à part) était tombée malade et hospitalisée au Chr de Hombo, notamment pour détresse respiratoire.Mais il y a encore plus alarmant dans cette affaire, et c’est le sort réservé aux mineurs non-accompagnés qui font partie des migrants enfermés à Trenani. Ils sont âgés entre 8 et 17 ans, et ont, d’après leurs récits, perdu la trace de leurs proches au cours de leurs pérégrinations.


Certains en mer, lors d’une opération de transbordement de passagers entre les kwassa qui devaient les transporter à Mayotte.
Certains ont en effet été mis dans un kwassa qui sera par la suite intercepté par les garde-côtes comoriens et reconduits à Ndzuani, pendant que leur mère a voyagé à bord d’un autre qui arrivera à destination, à Mayotte. Un autre enfant s’est ainsi séparé de sa tante, dont il n’a aujourd’hui aucune nouvelle. D’autres encore ont leur mère en France, et espèrent obtenir un visa pour aller la rejoindre.

Sans assistance appropriée, sans scolarité

Ces enfants sont toujours gardés à Trenani, aux côtés d’adultes inconnus, sans assistance appropriée, sans scolarité, alors qu’une « ordonnance de placement de garde des mineurs », émise le 7 mai dernier par la juge des enfants du Tribunal de première instance de Mutsamudu, a voulu mettre fin à cette situation. Dans cette ordonnance de la juge Zaïtony Daoud, il est clairement mentionné que « le centre de rétention de Ntrenani-Ndzuani n’est pas le lieu approprié aux mineurs et ne peut répondre à leurs besoins », et qu’ « il est de l’intérêt supérieur des enfants de les placer à l’Ong Sœurs Missionnaires de la Charité de la mission catholique à Ndzuani».Il convient par ailleurs de rappeler que depuis l’arrivée de ces migrants des Grands Lacs à Ndzuani, d’autres convois de migrants, cette fois malgaches, avaient suivi, mais aujourd’hui il n’en reste aucun en rétention. Le dernier convoi a été rapatrié par bateau, tandis que de précédents groupes, qui avaient été logés dans un hôtel à Mutsamudu, ont fini par quitter cet endroit incogniton

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