Les traversées en Méditerranée sont de plus en plus périlleuses, et plus en plus coûteux. Malgré tout, les voyages clandestins ne cessent d’augmenter. En partance de Tunis et de Laâyoune, tous ces chemins empruntés souvent par des Africains subsahariens, sont quasiment mortels. Ce, bien que de centaines de personnes parviennent à arriver à bon port.Dans un entretien commun accordé aux consuls généraux de l’Union des Comores à Laâyoune et à Tunis, respectivement Dr Said Omar Said Hassane et Chamsia Moindjie, ces derniers dressent un bilan de «seize Comoriens» qui ont péri dans la méditerranée de janvier 2022 à aujourd’hui dont quinze en partance de Laâyoune et un de Tunise.
«Nous faisons état de 15 Comoriens ayant péri dans la méditerranée de 2022 à aujourd’hui», a déploré le consul général de l’Union des Comores à Laâyoune, précisant que ces événements se produisent au large de l’océan Atlantique, au Sud Sahara marocain.Et d’expliquer :«le premier incident a eu lieu le 5 février 2022, dans les côtes maritimes de la ville de Tan Tan dans la région de Guelmim Oued-Noun à l’entrée du Sahara marocain. Une embarcation transportait une cinquantaine de migrants, dont 7 Comoriens qui ont péri». On indique également que «deux ressortissants comoriens de sexe masculin, originaires de Shindini et de Uropveni ont perdu la vie».
Des cadavres non retrouvés
Dr Said Omar Said Hassane a livré les circonstances de leurs décès, liées, selon lui, à «des crises d’angoisse» et à des «conditions de traversées difficiles», les forçant à se jeter en mer, selon une rescapée.«Le deuxième naufrage a eu lieu le 7 février 2023 dans la province de Boujdour dans la région de Laâyoune-Sakia El Hamra. 29 passagers, dont 18 Comoriens, étaient à bord de l’embarcation pneumatique. Après quatre jours en mer, ils ont été secourus par un bateau du Croissant Rouge espagnol le 11 février 2023. Cependant, 7 Comoriens dont une femme, ont perdu la vie», va-t-il préciser, regrettant que leurs corps n’aient pas été repêchés.
«45 migrants comoriens sont morts ou disparus depuis 2015»
Le responsable de la mission consulaire a évoqué un autre incident survenu le 10 février dernier, toujours à Boujdour où un Comorien, Bacar M’madi Sabiti de Nyumamilima ya Mbadjini a perdu la vie. Il a dit avoir saisi les autorités marocaines compétentes pour ce qui est de la recherche de la dépouille. Ces derniers lui auraient dit qu’il semblerait que le corps du regretté ait été laissé dans des endroits isolés sans possibilité de le retrouver.
Aucune information sur son corps n’a été jusqu’à aujourd’hui donnée. Une autre embarcation aurait, selon toujours lui, fait état de 3 Comoriens décédés, au cours de ce mois de février. Il a pris pour responsable de ces décès tragiques les parents et les proches, surtout de la diaspora qui facilitent ces traversées mortelles.Il a indiqué dans la foulée que «de 2015 à aujourd’hui, près de 45 migrants comoriens sont morts ou disparus», puisque depuis, personne n’a pu retrouver leurs cadavres. En tout cas, telles seraient les informations que disposent le bureau du Consulat comorien de Laâyoune concernant les personnes disparues en essayant de rejoindre les îles Canaries. Il précisera qu’ils ne disposent d’aucune information sur les morts ou disparus de l’autre côté de la méditerranée entre Nabor et Tanger.
«A Tunis, en 2022 aucun mort officiellement déclaré»
Pour ce qui est des traversées en provenance de la Tunisie, la consule générale, Chamsia Moindjie, s’est réjouie du fait qu’en 2022, aucun mort lié à la traversée n’a été déclarée. «En tout cas pas officiellement», a-t-elle précisé. Et de regretter que pour ce début de l’année 2023, un jeune homme de Mbeni a perdu la vie au large. «Ces dernières semaines, il y’a eu une entrée massive de jeunes comoriens en France provenant de Tunis. Ce qui fait craindre un afflux migratoire très conséquent en Tunisie cette année. La plupart des candidats à ces voyages accidentels sont des jeunes de la vingtaine. On y retrouve des étudiants qui ont même un master», a-t-elle indiqué.
La consule des Comores à Tunis a dit espérer que les parents «aimants», qui financent souvent ces longs voyages prendront conscience de la gravité du risque qu’ils font courir à leurs enfants. Toutefois, force est d’informer que certains parents ignorent même ce que leurs enfants s’apprêtent à faire. «Ma cousine est morte dans l’embarcation du 7 février dernier. La nouvelle nous a tous surpris car on l’a envoyée poursuivre des études supérieures au Maroc», a introduit une proche des victimes du 7 février avant de poursuivre que «personne ne savait qu’elle préparait un voyage. Elle demandait beaucoup d’argent mais disait que c’était pour ses études. A notre grande surprise, on nous annonce sa mort en Méditerranée».