Il y a quelques jours, Sagaf Maecha prétendument journaliste d’une page Facebook de la place, a été placé sous mandat de dépôt par la gendarmerie nationale après avoir publié de «fausses informations relatives à un viol collectif «. Après le constat, se pose la question de la légitimité de ceux qui exercent le métier. Qui est journaliste et qui ne l’est pas ? Pour répondre à ces questions, nous avons interrogé Ali Moindjié, ancien journaliste et membre du Conseil national de la presse et de l’audiovisuel (Cnpa).
L’intéressé citera le nouveau code de l’information et de la communication adopté il y a peu par les députés, mais qui n’est toujours pas promulgué. Une loi qui selon lui «devrait nous engager tous d’autant qu’elle répond notamment à votre question : qui est journaliste ?» Et pour lui, un journaliste est une «personne qui diffuse des contenus par le biais d’un organe d’information et qui est rétribuée par cet organe. Donc s’il n’y a pas de rétribution par un organe d’information, on ne peut pas parler de journaliste. Il suffit de demander ses bulletins de paie».
Le nouveau Code de l’information
Une lecture somme toute logique dans la théorie, mais qui pèche dans la pratique puisque la majorité des «journalistes» du privé n’a pas de salaires à proprement parler. Aussi, «personne ne peut empêcher un citoyen d’avoir son compte Facebook et d’y diffuser des contenus… »
Pour autant, «les réseaux ne transforment pas les gens en journaliste. Ils posent des problèmes qui appellent à un débat public, mais comme vous le savez on est un pays qui a peur de la confrontation des idées. Ainsi, chacun campe sur ses convictions et s’enferme».
Souvent pointé du doigt pour son «silence» dans des affaires concernant des journalistes et d’ainsi soutenir par sa «passivité» la situation chaotique qui prévaut dans le secteur, Ali Moindjié affirme que «le Cnpa s’est exprimé à chaque fois que cela a été nécessaire. Vous confondez le rôle du Cnpa et celui des organes professionnels».Néanmoins, le conseiller au Cnpa concède : «on peut faire au Cnpa un vrai reproche : c’est lui de ne pas être assez fort pour faire respecter les décisions».
Le Cnpa est un «organe de l’administration. Il devrait pouvoir compter sur les moyens de l’État pour faire respecter ses décisions et c’est le cas des forces de l’ordre. Or aujourd’hui, personne ne sait comment faire pour que la force publique fasse respecter les décisions du Cnpa».
Compter sur les moyensde l’État pour faire respecter ses décisions
Il citera en exemple la fermeture de la Radio Kaz fermée par le Cnpa sur la base d’une «délibération argumentée» et qui a ensuite été rouverte.À la question de savoir si la fin du mandat des membres du Cnpa ne fragilise pas leur mission, Ali Moindjié explique qu’ils sont les premiers à avoir signifié la fin de leurs mandats au ministre de l’Intérieur.
Seulement, «ce n’est pas à nous de renouveler le collège, c’est aux hautes autorités de le faire. Nous sommes des gens responsables, nous tenons la maison en attendant cette décision». Autre constat livré par l’ancien directeur d’Al-watwan : «les autorités n’accordent pas l’importance nécessaire au régulateur des médias. Nous nous sommes battus pour cela.
La carte de presse
Le Cnpa a mis en place une carte d’identité nationale de journaliste dont le fichier est tenu par l’établissement qui garde le fichier des passeports». Un décret devait suivre, mais il n’est jamais venu.
Et si les cartes ont été considérées comme une piste pour lutter contre l’anarchie, elles n’ont été délivrées qu’à quelques journalistes. La commission, composée de plusieurs personnes et organes de Ngazidja, Ndzuani et Mwali, faute de moyens n’a pas pu poursuivre les travaux.
Les cartes distribuées sont aujourd’hui expirées. Le Cnpa, disposant d’un budget annuel de 15 millions de francs comoriens se dit dans l’incapacité de remplir pleinement sa mission.«Les budgets que nous avons présentés n’ont jamais été retenus. Ces 15 millions datent de l’époque de l’ancien président Ikililou Dhoinine», martèle Ali Moindjié avant d’affirmer que malgré cela «nous avons fait des choses grâce à la coopération».
Il citera notamment «le studio d’enregistrement logé à l’Ifere, l’audit de la presse, le lancement du programme formation ou encore le nouveau Code». Pour lui, le mandat actuel des membres du Cnpa a permis aux membres de travailler durement et à faire «des choses qui vont servir. C’est donc manquer de respect au travail effectué que de dire que rien n’a été fait».