Aylan (le prénom a été modifié) a 14 ans. Dans quelques jours, il fera sa rentrée scolaire au Lycée Français International Henri-Matisse. « C’est depuis mon inscription ici, il y a deux ans, que j’ai appris à nager. Toutes les semaines, nous avons deux heures de piscine. C’est une matière obligatoire », explique-t-il. Le Lycée français est le seul établissement qui dispense des cours de natation aux Comores. « La natation scolaire fait partie intégrante des programmes d’enseignement de l’école. Elle est donc assortie d’un caractère obligatoire », lit-on sur le site du ministère français de l’Éducation nationale et de la Jeunesse.
Son frère, Ali, 11 ans, a moins de chance. Il est inscrit dans un autre établissement scolaire. « On n’enseigne pas la natation dans son école et donc Ali ne sait pas nager », a regretté notre interlocuteur. Les parents l’ont inscrit dans des cours de natation dans un hôtel au nord de la capitale, « mais il n'est pas assidu », poursuit l’élève.
Le drame qui vient de toucher le pays, avec la mort par noyade de deux garçons à Maloudja et Chamdro sur l’île de Ngazidja, devrait susciter un débat sur l’importance de l’apprentissage de la natation pour les Comoriens dès leur plus jeune âge, dans un pays insulaire comme le nôtre. « Bien trop souvent, nous déplorons des noyades, des morts injustes, d’autant plus que notre pays est entouré par l’océan », déclare Halifa Mlamali, un responsable de la fédération de natation. Des décès qui auraient peut-être pu être évités. Malheureusement peu de personnes savent nager de l’avis même des professionnels même si l’on manque de données officielles.
Amina Abdillah a toujours vécu à quelques pas d’une grande et belle plage au nord de l’île. Comme beaucoup de compatriotes, la quadragénaire ne sait pas nager. « Plus jeune, on m’autorisait rarement à aller dans l’eau. Fort heureusement, j’ai levé cette interdiction avec ma fille qui, elle, sait nager, elle a appris avec ses amies », confie-t-elle.
Attoumane Mohamadi, responsable principal du projet de la promotion de l’éducation physique et sportive, (Peps) ne cesse de « faire la plaidoirie de l’intégration de la natation comme matière d’apprentissage ». Seulement, sa volonté se heurte au manque effarant d’infrastructures, notamment de piscines. A Moroni, il doit y avoir 3 bassins ouverts au public pour peu qu’on ait les moyens financiers d’y accéder. Il reste la mer, mais se pose encore la question de la sécurité des apprenants. « La natation en eau libre, avec des bouées de sécurité est discutée », relate Attoumane Mohamadi. Pour l’instant, c’est encore à l’état de projet.
« Il y a très peu d’infrastructures aquatiques, ce qui explique la rareté et le manque de compétiteurs dans cette noble discipline olympique », déplore pour sa part Halifa Mlamali. Maesha Saadi, 17 ans, a participé aux Jeux Olympiques de Paris, alors qu’elle a réellement débuté la natation il y a seulement deux ans. Le parcours atypique de celle qui a remporté sa série sur le 50 mètres nage libre, a suscité l’intérêt des médias internationaux. De quoi susciter des vocations chez les Comoriens et les Comoriennes. « Dans ma classe, deux filles ont obtenu la meilleure note, 19/20, aux cours de natation », révèle Aylan. Des futures Maesha ?