Le nouveau code définit des critères rénovés pour jouir du statut de journaliste aux Comores. Une bonne manière d’éviter, selon plusieurs témoignages, «le laisser-aller qui existait» dans l’exercice de la profession. De l’avis de tous, l’adoption de ce nouveau code «est une bonne chose» pour les organes de presse et les journalistes.
Ces derniers attendent voir maintenant les mesures d’accompagnement nécessaires qui seront prises pour assurer l’application effective des nouvelles dispositions.
Le directeur général de La Gazette des Comores, Elhad Saïd Omar, estime que le code reste un cadre légal qui régit le secteur et toute la profession. «Ce qui importe à mon humble avis, dit-il, c’est surtout son application stricte».Il émet une inquiétude sur le principe de la dépénalisation des délits de presse qui «n’a pas été pris en compte par les législateurs de notre pays. Et c’est dommage».
Stricte application du code
Le patron de La Gazette des Comores pense que «l’Etat devra veiller à ce que le code soit bien appliqué en évitant les nombreuses entorses et violations souvent observées, y compris par ceux qui sont chargés de l’appliquer». De ce fait, «le Cnpa doit pouvoir jouer pleinement son rôle de régulateur en toute indépendance», déclare Elhad Said Omar.
Le directeur général d’Al-watwan, Maoulida Mbae, estime que la particularité de l’actuel code, ce sont les améliorations opérées pour combler les insuffisances de l’ancien notamment le statut propre du journaliste. L’ancien texte définissait le journaliste comme toute personne qui puise 60% de ses revenus dans ce métier. «Il était facile d’être journaliste aux Comores. Mais le nouveau code a revu cette définition du métier. Il exige une certaines condition notamment celle d’exercer d’abord pendant six mois dans un organe de presse avec un diplôme». L’environnement de l’audiovisuel a été repensé et restructuré.
Par exemple, pour ouvrir une radio «il faut déclarer la ligne éditoriale, avoir un directeur de publication qui doit être un professionnel. Les radios existantes doivent se conformer à ce nouveau code avec des cahiers de charges bien précises». Maoulida Mbae regrette le fait que certains médias «exploitent» les jeunes et ne le paient pas des années durant, avant d’ajouter que la régulation y est bien définie, il reste désormais comment la rendre encore beaucoup plus vivante.Le directeur de publication du journal Al fajr, Sultan Abdourahim Cheikh, pense que «les dérives et les dénigrements contre le journaliste comorien sont les conséquences du laisser-aller, de l’absence d’une réelle régulation et surtout du manque d’un cadre et environnement favorable».
«Protection» du journaliste comorien
Ce nouveau code est «un bon outil» qui contribuera à l’encadrement du métier. L’une des grandes nouveautés de ce code est «la subvention de l’État aux médias privés comme cela se fait avec les medias publics». Le chef d’Al-Fajr estime que le manque d’autonomie financière d’un journaliste contribue à la corruption et à la manipulation. «Un appui financier qui permet une autonomie, contribuera largement au respect des règles déontologiques et à l’indépendance du journalisme», dit-il, et plus important encore, «c’est l’application des textes qui compte beaucoup plus».
Le secrétaire général régional du Syndicat national des journalistes à Ndzuani (Snjc), Sardou Moussa, se réjouit que le nouveau code définisse mieux la qualité du journaliste et fixe un niveau minimum d’études pour exercer le métier ainsi que les différentes catégories de médias et leurs missions, y compris les médias en ligne, qui n’existaient pas avant. «Il propose une mutualisation des moyens de production de ces médias, comme il indexe clairement les activités incompatibles avec le métier. Il a converti les principes déontologiques et éthiques, jusqu’ici contenus seulement dans des chartes (nationale et internationales) en principe légaux, qui obligent donc le journaliste à pratiquer son métier dans la droiture».
Grâce à ce code, qui dispose que «l’État garantit au journaliste la sécurité de sa personne, de son matériel de travail, la protection légale et le respect de sa dignité dans l’exercice de sa profession. Le journaliste ne risque plus de voir sa caméra ou son micro casser par un policier ou un soldat lors, par exemple, d’une couverture d’une manifestation». Le nouveau code, qui a prévu une aide de l’Etat aux médias privés, n’a pas pu résoudre de façon précise la question liée à la précarité des journalistes.
Sardou Moussa constate que «le nouveau code encourage les patrons des médias à mieux traiter leurs journalistes mais ne fixe pas un salaire minimum. J’ai le sentiment qu’il a mis tout son accent sur la régulation extérieure, notamment par le Cnpa qui s’est vu attribuer trop de prérogatives au lieu de favoriser la régulation interne».
Autre point soulevé par les patrons de presse : la modalité de désignation des membres du Cnpa. Pour eux, ces modalités n’ont pas évolué malgré les grandes évolutions constatées dans le secteur.