Le pays pleure depuis le dimanche 7 mai la disparition d’un grand serviteur de l’Etat. Directeur général de la police pendant plus de 5 ans, Saïd M’changama a été inhumé ce lundi matin à Moroni, sa ville natale. Ses funérailles ont eu lieu à Badjanani, en présence des hauts gradés de l’armée nationale, de la police et de la gendarmerie. Plusieurs membres du gouvernement, dont le ministre de l’Intérieur, ont également pris part à la cérémonie funéraire de l’ancien patron de la sûreté nationale.
Le regretté était quelqu’un de « sociable, généreux », comme le témoigne l’ancien directeur général de la sûreté, Abou Achirafi Ali Bacar. L’actuel élu de la circonscription de Mutsamudu 2 fait partie de ceux qui ont connu et travaillé avec l’ex-Directeur général de la police. « C’est en 1994 qu’il a été nommé commissaire central de Moroni. Il avait sous sa responsabilité les autres commissariats annexes, notamment celui de Mitsamihuli. A l’époque, il s’occupait de la sécurité publique, la police judiciaire et de proximité », se rappelle celui qui a succédé à son ancien mentor en 2006, lorsque l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi l’a désigné pour prendre la tête de la Dgpsn.
«Nous nous entendions très bien. Je peux affirmer qu’il a beaucoup contribué à ma carrière et à ma nomination. Il disait toujours souhaiter me voir le remplacer. Il aidait tout le monde sans distinction. Pendant le séparatisme, il a contribué à ce que je sois promu chef du département migration et immigration », raconte l’actuel parlementaire.
Nouvelle génération
Abilyassir, l’actuel commissaire central de la police, confirme à son tour que grâce à Mchangama, de nombreuses générations d’académistes ont réussi à gravir les échelons de l’institution. «Si nous sommes là aujourd’hui, c’est parce qu’il nous a propulsés sans exception. Tout le monde le respectait », assure l’officier. « Il n’avait certes pas fait une école de police, mais l’ancien directeur maitrisait le travail, pour avoir commencé en tant qu’agent pendant la période coloniale », note Abou Achrafi, qui salue la mémoire d’un ami, d’un policier, qui a aussi «œuvré pour la réconciliation du corps». « Même lorsque les polices des îles ont fait leur apparition, il a réussi à maintenir la collaboration aussi bien à Ngazidja qu’à Ndzouani avec la force de la gendarmerie d’Anjouan. Il parvenait à alimenter les autorités de renseignements. Sans ce lien, entretenu malgré les crises, nous ne serions parvenus à rattacher la police», jure l’ex directeur général de la police sous Sambi.
Saïd M’changama a passé plus de 30 ans à la police. D’abord en tant qu’agent, puis commissaire central, puis directeur général adjoint avant d’être promu directeur de la police par l’ancien premier ministre feu Abbas Djoussouf. A son arrivée au pouvoir, en 1999, Azali Assoumani, dont il était resté proche, l’a reconduit à la tête de l’institution, jusqu’à ce que le président Sambi le remplace.
En dehors du travail, il était un homme courtois, généreux, qui cherchait toujours à satisfaire les souhaits de ses semblables. Né à Madagascar, où il a passé toute sa scolarité, Saïd M’changama a rendu l’âme à l’âge de 68 ans. « L’ancien président Saïd Mohamed Cheikh, qui est aussi notre grand père, a plaidé pour notre retour au pays. Une fois sur place, il a intégré M’changama à la police, bien qu’il eût suivi une formation de comptabilité. C’était dans les années 70. Depuis il a servi le corps jusqu’à son remplacement en 2006», se remémore son frère cadet, le commissaire Daroueche Ahmed, de la brigade des mœurs.
Avant de partir à la retraite, l’ancien patron de la sûreté a officié en tant que conseiller de Hamidou Bourhane, lorsque ce dernier était ministre de l’Intérieur. Son ancien compagnon, l’ex commissaire Ali Msaidie Tadjiri, a adressé ses condoléances à sa famille pour la disparition de celui qui a su « diriger la police avec rigueur et respect ». « Nous ne le remercierons jamais assez pour avoir joué le rôle de père. Il est d’ailleurs celui qui m’a fait entrer au sein de la police», regrette le commissaire Daroueche.