Amine Halawi l’ex directeur général de la Banque fédérale de commerce (Bfc) soupçonné de complicité de blanchiment d’argent fait des aveux troublants. Il met en cause certains actionnaires principaux dans des opérations illicites. Les premiers audits réalisés, révèlent qu’Amine Halawi, avait ouvert à l’insu de la Banque centrale des Comores quatre comptes bancaires à la Bfc au nom de Jho Taek, Abdoula Sabah et Tankim Loong… tous des étrangers résidant hors des Comores.
Selon l’ancien directeur de la Banque, une somme d’environ 1,72 million d’euros a transité sur le compte ouvert au nom de Jho Taek. en novembre dernier, le sulfureux homme d’affaire malaisien, Low Taek Jho, de son nom au complet, a été visé, avec son partenaire Eric Tan Kim Loong et un certain Mohamed Badawy Al Husseiny , d’une enquête menée par les autorités de Singapour pour opération de blanchiment d’argent liée à un fonds d’État malaisien 1MDB (Malaysia Development Berhad) qui est le nom d’un fonds souverain malaisien.
Pour ne citer que cette affaire où l’on retrouve auparavant nos deux compères dans une opération de blanchiment, toute proportion gardée, similaire. Difficile d’affirmer si ce sont les seuls comptes ouverts dans cette institution bancaire pour couvrir des activités illicites tant que l’enquête ne sera pas clos au niveau de la gendarmerie, l’enquête étant toujours en cours.
Devant les enquêteurs de la Brigade de recherches de Moroni au cours d’une audition, le 14 septembre dernier, effectuée dans le cadre d’une enquête préliminaire, l’ex directeur général reconnaitra les faits, tout en précisant qu’il a ouvert ces comptes “sous la pression” de ses “supérieurs hiérarchiques”. Ascension et déchéance Amine Halawi n’est pas n’importe qui, il connait les recoins de la boîte, pour y avoir franchi tous les échelons.
Celui qui est venu aux Comores en 2009 depuis son Liban natal, va travailler en tant que consultant de la la Bfc jusqu’en 2011. Il sera par la suite nommé chef des opérations, puis directeur adjoint avant d’être nommé en 2014, à la tête de cette institution bancaire jusqu’ à son éviction au mois d’aout dernier.
La deuxième personne que l’ancien directeur général de la Bfc incrimine dans cette présumée opération de blanchiment d’argent n’est autre que Bashar Kiwan, patron du holding Cgh et ex chouchou tombé en disgrâce du gouvernement Sambi.
Halawi raconte : “En 2016, je me trouvais au Liban, plus précisément à l’aéroport où le chauffeur de Awi (Al Waseet International, la société du franco-syrien Bashar Kiwan, spécialisée dans la communication et la publicité et basée à Dubaï, Ndlr) m’a fourni les dossiers complets d’ouvertures des comptes avec une lettre manuscrite [indiquant] de prendre soin de ces comptes parce que cela allait faire du bien à la société et l’économie de l’Etat.”
L’ancien directeur général de la Bfc précise qu’une fois retourné à Moroni, Bashar Kiwan, ne l’a pas lâché d’une semelle et a commencé à le harceler afin qu’il ouvre ces fameux comptes. Entre autres affaires de cette banque, on se rappelle que le principal actionnaire de la Bfc, avait accusé son ancien collaborateur, Bashar Kiwan, de lui avoir usurpé la somme de 4 millions d’euros (Lire Al-watwan du 11 avril 2017).
Devant les officiers de la police judiciaire, l’ancien directeur général soutient avoir directement bloqué les transactions dès qu’il a su qu’il y avait quelque chose de louche. Il dit avoir, durant ce temps, informé le conseil d’administration de la banque sur cette affaire et avoir saisi la banque correspondante Bmce à Madrid pour arrêter tout décaissement ou encaissement des quatre comptes qu’il l’aurait ouvert, sous la pression des ses chefs hiérarchiques.
Amine avait révélé à la commission d’enquête parlementaire que les dix millions d’euros de fond de démarrage de la Bfc proviendraient de l’argent issu de la vente des passeports comoriens Il faut savoir qu’Amine Halawi n’est pas à ses premières révélations choc.
Quelques jours avant qu’il ne soit débarqué de la direction de la Bfc, le 31 juillet dernier, celui-ci a dévoilé le statut juridique de cette banque, au cours d’une audition d’environ une heure et demie devant la Commission d’enquête parlementaire sur le programme de citoyenneté économique.
Un témoignage qui réconforterait la thèse selon laquelle, les dix millions d’euros de fond de démarrage de la Bfc proviendraient de l’argent issu de la vente des passeports comoriens à des étrangers. Celui qui était toujours patron de la banque sentait-il sa tête mise à prix, au point de tout déballer ?
Il dira à la police peu avant sa garde à vue qu’il a été licencié à la Bfc à cause de certaines “ histoires” et “vérités” qui ont eu lieu au sein de la Bfc à la suite de la venue de nouveaux membres du conseil et dont il aurait voulu s’opposer.
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Une chose est sûre, on est loin d’avoir cerné les tenants et les aboutissants de cette affaire aux multiples répercussions. Une procédure judiciaire est en cours et dès le début de ce mois d’octobre, l’ex directeur de la banque fédérale de commerce devrait comparaitre devant le tribunal de Moroni.