Tous les signaux indiquent, à ce jour, que l’opération « Wuambushu » aura bien lieu à Mayotte, à partir du 21 avril prochain. Préparé en catimini par le ministre français de l’Intérieur et des outre-mer et révélé fin février par le Canard enchaîné, ce projet de destruction massive continue d’inquiéter. Les Comoriens craignent qu’une telle opération ne se solde par un génocide étant donné qu’elle vise un groupe d’individus bien précis. D’autres craignent que l’opération déstabilise toute la région de l’Océan indien. Lundi, le gouvernement comorien a demandé à la France d’y renoncer. Mais aucune suite n’a été donnée.
Dans ce cas, insistent de nombreux leaders de la société civile, les autorités comoriennes devront faire preuve de fermeté en commençant par refuser d’accueillir les reconduites. “Vous avez aussi certainement vu dans les déclarations de l’État français qui souligne que sans l’assentiment de nos autorités, l’opération ne réussira pas. Cette collaboration repose sur l’accueil des expulsés dont certains ont déjà commencé à arriver à Anjouan”, a exposé le président du parti Ukombozi.
Abroger l’accord de 2019
Idriss Mohamed, militant de longue date et animateur emblématique du Comité Maore ne manquera pas de dénoncer le visa Balladur, à l’origine de cette insécurité et les milliers de morts, recensés dans le bras de mer séparant Ndzuani de Mayotte. En 2018, en pleine crise diplomatique, Moroni refuse d’accueillir les Comoriens chassés de chez eux à Mayotte. Cela avait irrité les autorités françaises, qui, en guise de représailles, ont suspendu l’octroi des visas. Ainsi, ne pas accepter les reconduites est tout ce qui reste à faire martèle, Idriss Mohamed qui a révélé qu’à l’heure actuelle, l’État comorien reste en position de force et peut donc faire plier Paris. Parce qu’en dehors des risques de violations des droits humains qui planent sur l’opération, le pays n’est pas en mesure de recevoir d’un coup, en l’espace de deux mois plus de 2000 personnes, a-t-il alerté.
De son côté, le comité Maoré prévient la société exploitant le bateau Maria Galanta, que si celui-ci accepte de conduire des Comoriens par la force, elle aura à faire à la colère du peuple comorien. “Car ce navire ne respecte pas la dignité humaine. Et si un Comorien n’a pas sa place dans une île comorienne, les Français eux non plus n’ont rien à faire ici”, fait remarquer Youssouf Atick, président du Comité Maoré qui appelle l’État comorien à affréter, lui aussi, des bateaux pour renvoyer les Français.
Pour sa part, Nadia Tourqui, elle, plaide pour l’abrogation à l’immédiat de l’accord-cadre signé le 22 juillet 2019 entre la France et les Comores. “Il faut aussi porter le dossier devant des institutions internationales en introduisant des plaintes des plaintes auprès de la Cour pénale internationale et de la Cour internationale de justice”, a ajouté cette militante du Collectif de la Troisième voie. A une semaine de son lancement, le projet «Wuambushu » suscite toujours des inquiétudes, à tel point que des associations de défense des droits humaines, des collectifs de praticiens et plus récemment l’Unicef France ont ces derniers temps appelé la France à stopper cette opération. Une centaine de policiers et de gendarmes sont attendus à Mayotte pour mater les délinquants et raser les bidonvilles. Pour protester contre cette opération qualifiée de pogrom, un rassemblement est prévu demain samedi, à Moroni.