Le Consortium international des journalistes d’investigation (Icij) continue de lâcher ses bombes au fil des jours. A l’échelle mondiale, des dirigeants politiques, des chefs d’entreprise, des stars, des avocats de renom sont cités comme faisant partie de personnalités ayant «dissimulé» d’importantes sommes pour échapper aux services des fiscs de leurs pays.
Des opérations financières fictives présumées ont été révélées au grand jour grâce aux 11 millions de documents épluchés par l’Icij. Le Consortium fait des révélations troublantes et crache des sommes colossales «dissimulées» via des sociétés offshore avec des montages financiers hors normes. L’enquête fait trembler les milieux d’affaires et mobilise la presse internationale.
Aux Comores, toutefois, le travail d’investigation louable, de la journaliste Hayatte Abdou, ne révèle pas grand-chose. L’enquête évoque des sociétés créées sans véritable enjeu politico-financier sur la nature de leurs activités. L’investigation faite ne laisse apparaitre aucune connexion avec des paradis fiscaux ou de milieux d’affaires suspects. On a d’ailleurs appris que certaines sociétés en question, avant d’être fermées, n’avaient enregistré «aucune activité».
Rien d’illégal et de suspect
Dans l’enquête menée aux Comores, trois noms ont été cités : la gérante de l’Egt, Mme Faharate Mahamoud, l’avocat Afif Mshangama et le conseiller privé du chef de l’Etat, Nour-El Fath Azali. On y voit la société Select Cars Africa pour la première et Olifants Ltd pour le dernier. Les trois personnes ont confirmé l’existence des sociétés citées dans l’enquête. Ce qui n’a rien d’illégal et de suspect.
Le manque de trace de la première société sur le web a surpris l’enquêtrice qui souhaitait creuser pour y voir clair, quitte à considérer l’absence de Select Cars Africa sur «Google» comme étant un fait suspect. Mais la patronne de l’Egt y a fourni ses explications. «Nous n’avons pas besoin d’exister ni physiquement ni numériquement», souligne Mme Faharate Mahamoud.
Les autres aspects de l’enquête instillent les incompréhensions entre l’Egt et l’Agence nationale pour la promotion des investissements (Anpi). (…).
S’agissant de la société créée par l’actuel conseiller privé du chef de l’Etat, la journaliste n’y apporte aucun élément suspect se rapportant à l’esprit de l’enquête, telle que menée depuis la maison mère du consortium. La journaliste a d’abord confirmé l’existence légale de cette société avant de préciser sa fermeture en 2019. Au sujet de la facture payée peu avant la fermeture de la société, Nour-El Fath Azali, cité dans l’article, parle d’«une histoire de démarches». Il fallait, administrativement parlant, payer pour le renouvellement de la societé.
Le conseiller privé, ancien cadre d’une banque, avait projeté se lancer dans les affaires. «Vous savez, au début, je ne voulais pas entrer en politique, je voulais faire du business. J’ai créé cette société Olifants Ltd car je voulais travailler pour moi, c’est une société de conseil, d’audit, d’investissement et divers», a expliqué Nour El Fath Azali, précisant avoir jugé nécessaire de fermer la société après sa nomination à Beit-Salam pour éviter un mélange de genre.
Les journalistes qui ont participé à cette enquête de grande envergure (la deuxième après celle des Panama papers) souhaitaient surtout faire ressortir des connexions possibles entre les Etats ou ses responsables et des paradis fiscaux via des société soffshore. Les informations livrées à l’Icij par notre consœur Hayatte Abdou ne fournissent pas des données laissant supposer l’existence d’une fuite organisée de capitaux encore moins des sommes placées dans de paradis fiscaux.
Des relations de routine
Les croisements des données n’ont pas permis, comme le souhaitait l’enquête, de faire des liens suspects entre Afif Mshangama, Nour-El Fath Azali et la chef de l’Entreprise générale de terrassement (Egt). Les trois personnes disent se connaitre mais affirment n’entretenir que des relations de routine. Le conseiller du président a affirmé n’avoir aucun lien particulier avec Faharate Mahamoud si ce n’est que dans le cadre des échanges sur le dialogue Public/Privé initié par le chef de l’Etat.
Afif Mshangama souligne lui aussi l’inexistence de liens suspects avec qui que ce soit. «Il était aux Emirats, sur place. Je lui ai envoyé de l’argent pour payer la facture» affirme la patronne de l’Egt non sans faire comprendre que la transaction en question relèverait du classique comme il pourrait le faire avec une autre personne ayant les mêmes facilités.
Les informations des Pandora Papers sur les Comores ne révèlent pas des faits de création de société offshore, de blanchiment ou d’évasion fiscale mais plutôt des rapports entre trois personnes dont les sociétés citées n’étaient ni fantômes ni prédatrices de fonds. L’enquête, pour l’instant, n’a révélé ni suspecté des opérations occultes.
AS Kemba