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Le premier journal des Comores

POUR EN FINIR AVEC LE VACARME

POUR EN FINIR AVEC LE VACARME

Société | -

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Depuis quelque temps, notre espace public s’abandonne aux invectives, aux rumeurs et aux émotions faciles. Lénine l’avait déjà formulé : « l’injure est la preuve qu’on n’a plus d’arguments ». Aujourd’hui, cette maxime révèle avec une clarté cruelle la faillite de notre débat politique.
Nous ne pouvons plus tolérer que la politique soit dévoyée en un théâtre d’humeurs, de polémiques artificielles et de gesticulations creuses. Diriger par l’émotion est une dérive dangereuse : elle interdit la vision, elle tue la stratégie, elle abolit la responsabilité.
Pendant que les faux débats se multiplient, les véritables défis demeurent, immobiles, exigeant rigueur et courage.
Nous devons organiser les Jeux des Îles de l’océan Indien, événement continental où se jaugeront notre capacité d’organisation, notre discipline et le sérieux de notre administration.
Mais, plus encore, nous avons un impératif sacré : défendre la justice, coûte que coûte.
Sans justice, aucune institution ne résiste, aucun projet ne se construit, aucune Nation ne tient debout.
Dénoncer les dérives, toutes les dérives, est un devoir :
celles qui affaiblissent l’État, celles qui brouillent l’opinion, celles qui détournent les ressources, celles qui dénaturent l’action publique.
Un pays avance lorsqu’il fait des choix clairs, assumés et courageux.

Et un pays se bâtit lorsqu’il parvient à un minimum de consensus sur ce qui touche au cœur même de sa survie :

-la vie quotidienne de ses citoyens,
-les droits et la dignité de ses familles,
-l’avenir de ses enfants.
Or notre débat national s’est dangereusement égaré.
Au lieu de se concentrer sur ces priorités essentielles, il se réduit inlassablement à une obsession stérile :

le partage immédiat du pouvoir,
au lieu de la conquête démocratique par des urnes sûres, transparentes et crédibles.

Il faut le dire avec gravité :
Des entreprises honnêtes meurent faute de commandes publiques.
Car sans équité, sans concurrence loyale, sans règles impartiales, l’État perd toute crédibilité. Une économie verrouillée et capturée ne peut engendrer ni innovation, ni croissance, ni prospérité pour son peuple.

Un État moderne doit garantir :
-la transparence des marchés,
-l’ouverture des opportunités,
-la clarté des procédures,
-la loyauté de la compétition.

Sans cela, la confiance se délite et l’avenir se ferme.
Les enjeux majeurs sont pourtant là, évidents, urgents :

-le budget et la discipline de gestion ;
-la fiscalité, moteur de tout développement ;
-l’énergie, colonne vertébrale de notre souveraineté ;
-l’économie bleue, horizon stratégique de notre insularité ;
-le pétrole, avec ses implications géopolitiques ;
-la mutation technologique globale, qui redessine les puissances du monde.

Tant que ces sujets ne seront pas traités avec sérieux et responsabilité, nous continuerons de marcher à contre-sens de notre propre avenir.

Sans démocratie, il n’y a que la force.
Sans État de droit, il n’y a que l’arbitraire.
Sans justice, il n’y a plus de confiance.

Les Comores ne se construiront ni par l’insulte, ni par la manipulation, ni par les emballements émotionnels.
Elles se construiront par la vérité, par la liberté, par la transparence et par la rigueur.
Il est temps d’élever notre exigence.
Il est temps d’ouvrir un débat national sérieux, lucide, argumenté.
Un débat fondé sur les enjeux, non sur les humeurs.
Un débat tourné vers l’avenir, et non prisonnier du vacarme présent.
Nous avons les Jeux des Îles à organiser.
Mais, surtout, nous avons une Nation à édifier : une Nation qui requiert des choix, du courage et un sens aigu des responsabilités.

La justice : coûte que coûte.
La dénonciation des dérives : quoi qu’il en coûte.
L’équité économique : sans conditions.
La démocratie : en toutes circonstances.
Le débat de fond : dès maintenant.

Le pays n’est pas une scène de théâtre. C’est notre héritage. C’est le destin de nos enfants.

Ahmed Ali Amir

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