Le procès pénal contre la compagnie Yemenia, ouvert depuis le 9 mai au tribunal correctionnel de Paris, entre dans sa dernière phase. Après le témoignage très glaçant du 23 mai de Bahia Bakari, la seule survivante du crash qui a causé la mort de 152 personnes dans la nuit du 29 au 30 juin 2009, place donc aux avocats de la partie civile. Ces derniers, ont commencé depuis hier lundi à plaider. La cour leur a accordé trois jours du 30 mai au 1 juin pour défendre les familles des victimes, d’après le calendrier du procès. Parmi les conseillers qui ont fait le déplacement à Paris, on retrouve entre autres Me Bahassani Ahmed, Me Said Larifou et Me Ali Mihidhoir. Avec d’autres avocats français, ils plaideront la cause des familles.
Après eux, ce sera le tour de la procureure de faire ses réquisitoires, jeudi. “Quant à la date du verdict, on nous la communiquera ultérieurement. Mais normalement, ça ne prend pas du temps. Trois mois au maximum”, a indiqué le président de l’association des familles des victimes, Said Assoumani. 13 ans après l’accident du vol 626 de la Yemenia Airways qui a fait 141 morts sans compter les 11 membres d’équipage, les proches espèrent connaitre enfin la vérité à l’issue de ce procès qui prendra fin officiellement le 2 juin. Mais, pour le président de l’association des victimes que les familles aient pu extérioriser, tout raconter devant la barre était une étape nécessaire.
L’ancien ministre Dini Nassur nous avait résumé l’essentiel de son intervention. “ J’ai parlé de la souffrance des familles des victimes en commençant par expliquer la notion de famille aux Comores, ses fondamentaux et ses rapports avec la mort et le mariage. J’ai décrit la structure du deuil et démontré ses conséquences psychologiques, sociales et économiques endurées par les familles. J’ai fini par dire l’obligation de réparation par la justice et l’impératif d’ériger un mémorial pour les victimes”, nous relatait-il.
Soulagement et condamnation
“ Ce fut une sorte de thérapie pour nous tous. Du témoignage très attendu de Bahia jusqu’aux autres récits des enfants nés en 2009 et qui n’ont jamais vu leurs parents. C’était émouvant. Bien sûr cela ne va pas nous guérir, mais on a pu se soulager un peu”, estime Said Assoumani qui espère que la compagnie sera condamnée pour ses fautes et négligences révélées par les enquêteurs. Ces derniers ont révélé des détails importants que les familles ignoraient jusqu’à présent. “Certes, nous connaissions certaines choses mais pendant le procès nous en avons appris beaucoup plus. Par exemple, les heures que comptait le copilote en 7 ans. Il en avait seulement à son compteur que 500 heures. Des performances qui auraient dû être atteintes en un an”, a énuméré Said Assoumani dans un entretien accordé à Al-watwan hier.
Toujours durant ces 4 semaines, les familles ont découvert que les magistrats enquêteurs n’ont pu se rendre aux Comores pour la première fois qu’en 2019, soit donc 10 ans après le crash. “On ignore les raisons du blocage. C’est aux autorités comoriennes de répondre à la question”, a-t-il poursuivi. Un autre défi qui attend les avocats de la partie civile, “le risque de rejet” qui pèse sur les requêtes des victimes n’ayant pas la nationalité française. “Nous sommes contre cette philosophie car ils ont tous perdu la vie dans le même accident. On espère que nos avocats réussiront à faire valoir cet argument même s’il s’agit là d’une disposition de la loi française”, a conclu le président Said Assoumani