À Djwaezi, dans la commune de Mwalimdjini, le projet de construction d’une digue n’avance plus. Financé par la Banque mondiale dans le cadre du Projet de relèvement post-Kenneth, celui-ci vise à restaurer les infrastructures de base endommagées par le cyclone Kenneth, qui avait frappé les Comores en avril 2019, tout en protégeant les habitants des zones côtières contre les assauts de la mer.
Mais les travaux, confiés à l’entreprise égyptienne Arab Contractor et lancés en avril dernier, accusent de sérieux retards. Huit mois après le début du chantier, celui-ci devait être bien avancé, or il est à l’arrêt complet depuis environ trois semaines. Sur la plage de Djwaezi, aucun engin ne fonctionne, et le silence du site alimente toutes les spéculations. Certains habitants redoutent l’abandon pur et simple du projet, tandis que d’autres pensent qu’il s’agit d’un simple incident technique. « Avant et au début des travaux, la communauté villageoise était impliquée. On nous consultait sur les décisions importantes et on nous informait de l’avancement du chantier. Aujourd’hui, ni l’entreprise ni la mission de contrôle ne nous dit quoi que ce soit. Impossible de savoir s’il s’agit d’un problème de fond ou d’une panne d’équipement », déplore M. Robert, un cadre du village.
Un ingénieur de la société tente de rassurer, en affirmant qu’il s’agit d’un arrêt temporaire lié à une panne de la machine chargée d’aménager les carrières. Selon lui, les travaux se poursuivent sur d’autres sites du projet, notamment à Mbangali, et des solutions seraient en cours pour faire venir un nouvel engin à Djwaezi. Pour d’autres habitants, cette explication masque une réalité plus préoccupante. Ils estiment que l’entreprise concentre désormais ses efforts sur le chantier du port de Mbwangoma, à Domoni, où une grande partie du matériel aurait été transférée. « Ici, tout est au ralenti. C’est inquiétant, car une fois les travaux du port lancés, les eaux de mer risquent de se déverser dans les villages voisins comme Fomboni et Djwaezi. Nous sommes déjà menacés par la mer ; si la digue n’est pas achevée à temps, ce sera la catastrophe », alerte Lamouno, habitant de la zone côtière.Lors de la deuxième réunion du comité de pilotage du projet de relèvement post-Kenneth, tenue en juillet dernier à Mwali, la coordinatrice du programme avait reconnu que cette île accusait un retard considérable par rapport aux autres. Alors que les taux d’avancement atteignent 90 % à Ngazidja et 52 % à Ndzuani, Mwali n’enregistre que 47 % de réalisation. Initialement prévu pour s’achever à la fin de novembre 2025, le projet a été prolongé jusqu’en juin 2026 pour permettre de combler les retards.
Sur le terrain, les travaux de la digue de Djwaezi ont débuté par l’aménagement d’un espace vert sur la plage de Mapiashingo, destiné à stabiliser le sol et à freiner l’érosion côtière. Les interventions suivantes doivent renforcer la route reliant la ville au plateau de Djando et protéger le littoral par des enrochements et des structures de bois conçues pour retenir le sable et évacuer les eaux pluviales vers la mer. Pourtant, à ce jour, seule la première phase est achevée.
Huit mois après le lancement officiel du chantier, la population de Djwaezi attend toujours que les machines reviennent et que la digue prenne enfin forme ; celle qui doit la protéger de la mer et symboliser, pour beaucoup, le véritable relèvement post-Kenneth.
