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Reportages de presse à Ndzuani I Deux journalistes français sommés de rentrer

Reportages de presse à Ndzuani I Deux journalistes français sommés de rentrer

Société | -   Sardou Moussa

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Arrivés au port de Mutsamudu, la police leur demande une accréditation écrite du Cnpa (Conseil national de la presse et de l’audiovisuel), or ils ne l’avaient pas. Après plusieurs heures à essayer d’entrer en contact avec un responsable de cet organe, leur guide est parvenu à avoir son président au téléphone. Ce dernier demande aux policiers de laisser les journalistes sortir, promettant de produire l’accréditation le lendemain, mais ces derniers refusent avant l’ordre d’une autorité du ministère de l’Intérieur» leur demandant de rentrer chez eux.

 

Deux reporters de France Télévision, Yvan Martinet et Olivier Gardette ont été priés de rentrer à Mayotte par les autorités comoriennes le samedi 7 janvier dernier, après avoir passé l’après-midi puis une partie de la soirée à la brigade de la police aux frontières du port de Mutsamudu.


D’après les explications de deux confrères anjouanais qui devaient leur servir d’accompagnateurs, les journalistes français voulaient réaliser une enquête sur l’huile d’ylang-ylang, produite en grande partie à Ndzuani. «Ils voulaient comprendre comment les producteurs locaux de cette huile de qualité mondialement reconnue, et qui enrichit beaucoup de parfumeurs occidentaux, continuent malgré tout de vivre dans la précarité», indique Dhoulkarnaïne Abdouroihmane, l’un des fixeurs. Parallèlement à ce sujet principal, ils voulaient aussi «mesurer les conséquences environnementales de la déforestation».

Un reportage sur la traversée des kwasa

Mais, à en croire nos témoins, une idée leur serait ensuite venue en tête, alors qu’ils avaient déjà arrêté leurs sujets et pris les rendez-vous avec leurs sources : celle de profiter de leur séjour pour réaliser un autre reportage, cette fois sur la filière des traversées par kwassa vers Mayotte, puis un autre reportage (…).


Arrivés au port de Mutsamudu, la police leur demande une accréditation écrite du Cnpa (Conseil national de la presse et de l’audiovisuel), or ils ne l’avaient pas. Après plusieurs heures à essayer d’entrer en contact avec un responsable de cet organe, leur guide est parvenu à avoir son président au téléphone.
Ce dernier supplie les policiers de laisser les journalistes sortir, promettant de produire l’accréditation le lendemain, mais ces derniers refusent.


Les reporters étrangers sont toutefois parvenus à entrer en contact avec un responsable de la présidence de la République. L’intervention de ce dernier a d’abord persuadé les policiers et douaniers présents. Mais, visiblement, le sort avait décidé de jouer contre nos amis : le lecteur biométrique censé contrôler leur empreintes aux fins de la délivrance des visas, s’enraye ! Ils auront quand-même l’autorisation de sortir, sous condition de repasser le lendemain accomplir la formalité. Mais, juste au moment de franchir le portail de sortie du port, ils croisent un officier, qui leur intime l’ordre de retourner. Ce dernier affirmera aux deux journalistes qu’il «a reçu l’ordre d’une autorité du ministère de l’Intérieur» de leur demander de rentrer à leurs domiciles.

 

Un membre du gouvernement aurait justifié cette décision par le fait qu’ils n’auraient pas communiqué tous les sujets qu’ils souhaitaient traiter sur place. Il faut peut-être rappeler ce que dit le code de l’information au sujet de l’accueil des journalistes étrangers, ou travaillant pour des médias étrangers.«Le correspondant et l’envoyé spécial sont libres de se déplacer sur l’ensemble du territoire national. La transmission à l’étranger d’informations écrites ou audiovisuelles ne fait l’objet d’aucune censure», dispose l’article 172.


Nulle part dans cette loi, il n’est mentionné l’obligation pour les journalistes étrangers qui souhaitent venir réaliser un reportage ou une enquête aux Comores, de communiquer leurs sujets aux autorités politiques.
Les autorités peuvent toutefois, par mesure de sécurité ou d’intérêt public, restreindre ou interdire les publications d’organes étrangers si le contenu est de nature à porter atteinte à la morale publique et aux intérêts vitaux du pays notamment «la dignité de la personne humaine….la sécurité, l’unité nationale et à l’intégrité territoriale», selon l’article 6 du même code de l’information qui précise par ailleurs, dans l’article 171, que «le Cnpa lui attribue une accréditation» même si la loi ne précise pas si celle-ci est obligatoire pour permettre au reporter étranger d’effectuer librement son travail.

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