Après plusieurs années de tolérance informelle, la police nationale a lancé une opération de réquisition des véhicules à volant à droite, à compter du mercredi 28 mai. Une décision qui relance une mesure ancienne mais jusqu’ici peu appliquée, et qui suscite de nombreuses réactions dans les rangs des conducteurs.L’information, qui circulait depuis quelques jours, a été confirmée par plusieurs sources, notamment par le syndicat des chauffeurs Usukani wa Massiwa, à l’origine de la relance de cette interdiction. Son porte-parole, Moustoifa Hamid, explique que cette démarche vise à faire respecter le code de la route comorien et à renforcer la sécurité routière.
«Le code stipule clairement que les véhicules doivent être équipés de volants à gauche », affirme-t-il. L’article 249 du code de la route, promulgué en 2020, interdit en effet la circulation des véhicules à volant droit. Cette interdiction fait suite à un arrêté datant de 2018 qui prohibait déjà leur dédouanement. Pourtant, des voitures à volant à droite continuent d’être immatriculées sous des plaques récentes (CA, CB, CE), comme le fait remarquer l’Inspecteur Charbon Halifa Madihali, chargé des opérations routières à la Police nationale. Une situation qui interroge sur le fonctionnement des services de douane, de la police et des travaux publics. Selon l’Inspecteur, plusieurs usagers contournent la législation en faisant passer les voitures à la douane avec des volants temporairement repositionnés à gauche, avant de les remettre à droite une fois dédouanées.
Le désarroi des conducteurs
«Les procès-verbaux d’enquête le confirment. Certains mécaniciens repositionnent les volants à droite pour des montants allant de 50 000 à 100 000 francs comoriens», précise-t-il. À ce jour, 21 véhicules ont déjà été immobilisés. La Police appelle désormais l’État à prendre ses responsabilités. «Le ministère des Transports, le trésor public et même la présidence doivent se pencher sur cette tromperie organisée. Les contrôles vont se poursuivre indéfiniment, mais nous attendons des sanctions claires de l’État », affirme Charbon Halifa.
Face à cette décision, les conducteurs concernés expriment leur désarroi. Abdoulanzize Said, chauffeur de Vitz (un modèle de la marque Toyota très utilisé dans le transport en commun urbain), s’insurge contre une mesure qu’il juge précipitée et lourde de conséquences économiques. «On aurait dû nous prévenir. Beaucoup vont perdre leur emploi malgré les dettes qu’ils ont contractées pour acheter leur véhicule. Le coût de repositionner le volant est d’environ 200 000 francs, ce n’est pas supportable pour tout le monde», déplore-t-il.Même s’il reconnaît la nécessité de normes de sécurité et d’uniformisation du sens de la circulation, ce chauffeur estime que l’État aurait dû mieux anticiper les impacts sociaux de cette décision. En attendant une position officielle du gouvernement, les contrôles continuent, et l’avenir des véhicules à volant à droite en circulation reste incertain.
Moudjib Mohamed Said