Deux agents de la Société nationale de l’électricité des Comores (Sonelec), Sambaouma Nassur et Abdoul-Madjid Imam, ont été licenciés par le nouveau directeur général de l’établissement depuis mars dernier. Il s’agit respectivement du président et du gestionnaire de Unono Mwema, la mutuelle de santé de l’ex-Mamwe, regroupant les sociétés Sonelec et Sonede. Des licenciements qui ne font pas l’unanimité au sein des deux sociétés pour des questions de procédures.Selon les notifications de licenciement adressées aux deux agents, la direction générale de la Sonelec, a constaté « des irrégularités » liées à un détournement presumé de fonds au sein de la mutuelle. « Conformément aux dispositions légales et règlementaires en vigueur notamment l’art 533 et suivants le code pénal comorien, ainsi qu’à l’article 31 du règlement intérieur de la Sonelec, nous vous informons par la présente que nous avons pris la décision de procéder à votre licenciement pour faute grave, avec effet immédiat », peut-on lire sur les notifications du 4 mars dernier.
« Un problème de conformité »
Pendant ce temps, une lettre d’Abdounour Mohamed, conseiller juridique permanent du conseil d’administration de la mutuelle, adressée au directeur général de la Sonelec le 17 mars dernier, soulève «un problème de conformité» concernant la séance tenue avec les membres du bureau de la mutuelle, en place et sortants, ainsi que leur notification de licenciement. «L’acte de suspension des membres du bureau exécutif, dont copie ci-jointe, précise en son article 3 à qui sont dévolues les investigations et l’élaboration du rapport sur les comptes de la mutuelle, alors que cette séance s’est déroulée sans la participation des membres du conseil d’administration », conteste-t-il.
Al-watwan a par ailleurs découvert une lettre de la direction de la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (Sonede) répondant à la décision de la direction générale de la Sonelec de suspendre la mutuelle de santé commune aux deux sociétés d’État. La Sonede conteste «formellement» cette décision. Elle indique dans sa réponse qu’elle «ne tiendra pas compte» de cette décision et « continuera à travailler avec le bureau existant » en attendant la tenue d’une assemblée générale ou la mise en place d’une commission de suivi et de contrôle.
Pourquoi cette contestation de la Sonede face au licenciement de deux agents de la Sonelec ? Dans son courrier, elle rappelle : «Conformément à l’article 9 du statut de la mutuelle de santé Unono Mwema et à l’article 12 du règlement intérieur, seul le conseil d’administration ou l’assemblée générale est habilité à prendre des décisions de cette envergure ou toute autre action importante concernant le fonctionnement ou les activités de la mutuelle. La décision (…) n’est en aucun cas valide ni légale. »
Interrogé via WhatsApp sur ces licenciements, le nouveau directeur général de la Sonelec, Soilahouddine Moumini, a confirmé que les deux agents concernés sont passés en conseil de discipline, avant de nous orienter vers le service de communication de l’entreprise. De son côté, le chef du département communication, Sagaffe Boy Moustoifa, a justifié le licenciement par un «détournement de fonds à hauteur de 21 millions de francs comoriens, ainsi qu’une dette intérieure de 8,3 millions ». Et d’ajouter : «Cette décision ne dépend pas de la Sonede, car les deux agents avaient pour mission de représenter la Sonelec et de défendre ses intérêts. Ils n’ont pas su prouver le contraire devant la direction administrative et financière ainsi qu’un auditeur. Les souches ne correspondent pas aux opérations bancaires.»
Un détournement présumé de 21 millions
Du côté de la Sonede, deuxième société bénéficiaire de la mutuelle, son directeur des ressources humaines, Ali Amini Abdallah, estime que la suspension ou le licenciement des deux agents, pour détournement présumé, aurait dû faire l’objet d’une décision conjointe. «Les deux sociétés auraient dû se réunir avant toute décision, car chaque entreprise y est représentée. Il est difficile de comprendre comment deux membres du bureau peuvent être suspendus par la Sonelec alors que la Sonede n’a pris aucune mesure», explique-t-il par téléphone. L’un des agents licenciés, dans une lettre dont Al-Watwan a obtenu copie, affirme être prêt à démontrer son innocence, documents administratifs à l’appui. «La notification de notre licenciement mentionne l’article 69.3 de la charte des conditions générales de travail, applicable aux agents traduits en conseil de discipline, alors que nous n’avons reçu aucune convocation à ce sujet », s’étonne-t-il.