logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

Tressage entre voisins : une tradition en voie de disparition

Tressage entre voisins : une tradition en voie de disparition

Société | -

image article une
Jadis, le tressage entre voisines symbolisait complicité et entraide. Aujourd’hui, les salons de coiffure dominent. Ces derniers transforment ce geste convivial en activité marchande, et relèguent les souvenirs d’antan au passé.

 

Autrefois, il suffisait de frapper à la porte d’une amie, d’une voisine ou d’une sœur pour se faire tresser la chevelure gratuitement. Cette pratique, profondément ancrée dans la vie des adolescentes, rythmait les veilles de fêtes et les cérémonies culturelles. Aujourd’hui, ce rituel s’efface peu à peu, remplacé par l’essor des salons de coiffure qui ont transformé le tressage en activité commerciale. Pour Salma Msaidie, lycéenne, la raison tient au mode de vie actuel. « Beaucoup partent en ville pour étudier et ne rentrent que le week-end. Trouver une amie disponible pour tresser en semaine devient presque impossible», pense-t-elle. Chaharzade, étudiante à l’Université des Comores, regrette quant à elle la convivialité du lycée : «On profitait des moments libres pour se tresser entre copines. À l’université, avec les cours chargés, je n’ai plus ce luxe. Je finis par couvrir mes cheveux d’un foulard.»


Zaina, fille d’une ancienne coiffeuse de Mitsamihuli, se souvient des après-midi animés autour des tresses. Mais elle constate qu’«aujourd’hui, les jeunes préfèrent les salons pour essayer des mèches ou des perruques, surtout pendant les mashuhuli [festivités du grand mariage] ». Même constat pour Antoufia, qui se tressait autrefois avec ses amies ou sa sœur. Aujourd’hui, elles sont parties, mariées ou occupées. Je n’ai plus le choix, je me tresse moi-même», confie-t-elle. Nahlat, employée dans une institution financière, garde aussi la nostalgie de ses jeunes années.

«Ce lien était fort, mais il a disparu. Désormais, je vais dans un salon de coiffure pour retrouver un peu de tradition», admet-elle. Face à cette évolution, les coiffeuses en salon, de leur côté, s’adaptent. «Avant, une natte coûtait 500 francs. Aujourd’hui, cela peut atteindre 25 000 francs avec les mèches», explique l’une d’elles. La tresse gratuite d’antan, empreinte de complicité et de solidarité, cède donc la place à un service rémunéré, reflet d’une société où le temps se monnaye et où les traditions s’adaptent à de nouvelles réalités.

 Touma Saïd (stagiaire)

Commentaires