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Tumpa, la légende réhabilitée par la fiction

Tumpa, la légende réhabilitée par la fiction

Société | -   Youssef Abdou

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Le journaliste Mohamed Boudouri ressuscite une figure oubliée de la résistance comorienne dans un roman historique engagé.

 

Mohamed Boudouri, ancien directeur général d’Al-watwan, vient de publier Tumpa, le destin d’une légende, son premier roman. Ce texte ambitieux replonge dans un pan négligé de l’histoire comorienne (1771-1775), en détournant les récits traditionnels centrés sur les palais et les figures coloniales, pour mettre en lumière un héros populaire : Tumpa.Ce personnage mythique, peu documenté mais profondément enraciné dans l’imaginaire collectif, mena au XVIIIe siècle une révolte contre le sultan Saïd Ahmed, accusé d’avoir instauré un régime esclavagiste brutal. Dès 1771, Tumpa rassemble une armée de combattants autochtones pour contester ce pouvoir féodal. Il parvient à renverser le sultan, avant de tomber en 1775, tué lors d’une tentative de prise de Mutsamudu par des soldats étrangers venus écraser l’insurrection.Lors de la présentation de son ouvrage, Boudouri a insisté sur la trajectoire légendaire de ce combattant dont l’existence est marquée par le mystère. Il en dresse le portrait d’un homme mu par une soif de justice et d’égalité, dans une société archipélique secouée par les violences du pouvoir. Le roman fait revivre les paysages luxuriants de l’époque, notamment ceux de la Cuvette (Bambao), où Tumpa serait né, non loin du mont Tringui et du lac Dzialandze, véritables témoins silencieux de cette épopée.Dans une langue poétique et sensible, l’auteur évoque la mort du héros comme un « cri déchirant » résonnant à travers les siècles. Il explore aussi la mémoire populaire à travers l’expression proverbiale Za mpara Tumpa zitso hupara (ce qui est arrivé à Tumpa t’arrivera), interprétée comme une mise en garde ancestrale contre les révoltes. Une mémoire refoulée, mais que la littérature ravive.

Combler les silences des archives

Mohamed Boudouri ne revendique pas une posture d’historien. Il choisit délibérément la fiction pour combler les silences des archives et redonner à Tumpa une place centrale dans la conscience comorienne. Son roman se veut une réhabilitation, un geste de mémoire, une tentative de réparer l’oubli. Ce récit ne se limite pas à l’évocation d’un destin individuel : il interroge l’âme humaine, ses contradictions, et les aspirations d’un peuple.Un second tome est déjà en préparation. Il poursuivra cette exploration littéraire d’un passé longtemps marginalisé, dans un effort constant de revisiter et transmettre une mémoire vivante.

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