logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

Un enfant. Quelle beauté…

Un enfant. Quelle beauté…

Société | -   Contributeur

image article une
Chronique Bee Mensuelle / Quand pour se protéger d’une réalité insupportable, l’esprit et le corps reproduisent des schémas de violence comme pour les exorciser. Et aussi grave que le viol, le déni du viol. Des chercheurs ont établi que la réaction familiale et les conséquences sociales sont si dévastatrices qu’elles peuvent traumatiser les victimes d’inceste au-delà de la tragédie qu’ils ont vécue.

 

De grands yeux qui leur mangent le visage, une bonne bouille et une bonne paire de joues rebondies, des petits doigts, des petites dents qui constituent un petit être vulnérable mais plein de promesse. Vulnérable car il suffit d’un rien pour l’anéantir. Mais ce que nombre d’enfants subissent dès le plus jeune âge n’a rien d’anodin...  Une violence dévastatrice et qui se propage de famille en famille, une génération après l’autre. «Hamtowa e roho». Voilà ce que la violence sexuelle fait à nos enfants. Cela les tue en les «écœurant», leur enlevant le cœur. Pour survivre, les victimes développent des mécanismes de défense, parfois toxiques de dissociation et dépersonnalisation. Honte, dégoût, dépression, pensées suicidaires, addictions…


Quand pour se protéger d’une réalité insupportable, l’esprit et le corps reproduisent des schémas de violence comme pour les exorciser. Et aussi grave que le viol, le déni du viol. Des chercheurs ont établi que la réaction familiale et les conséquences sociales sont si dévastatrices qu’elles peuvent traumatiser les victimes d’inceste au-delà de la tragédie qu’ils ont vécue. Dans le parcours du combattant que constitue la vie après un pareil trauma, la réaction de l’entourage fait toute la différence.

Un viol peut vous détruire mais être rejeté, jugé, harcelé, moqué, traité de menteur peut empêcher tout processus de reconstruction.


A en croire l’avalanche de posts en réaction à la condamnation à douze ans de réclusion criminelle d’une personne coupable d’avoir violé ses enfants, tous les Comoriens condamnent unanimement la violence sexuelle. L’expérience prouve que non. Les appels au meurtre des pédophiles, les dénonciations tonitruantes à grand renfort d’émojis sur les réseaux ne changent rien à la réalité de nombreux enfants victimes dans notre communauté.

De nombreuses victimes*

Les pédophiles se portent bien, merci pour eux. Ils dorment, sur leurs deux oreilles. Bien à l’abri, ils sévissent sans peur et sans reproches dans nos familles. Les liens du sang jouent parfois même en leur faveur. Nous oublions que la menace majeure vient toujours de l’intérieur du foyer. Des enfants que la famille offre sur un plateau à un cheptel de pervers sexuels en la personne d’oncles de confiance, voisins omniprésents, pères au-dessus de tout soupçon et autres fundi soi-disant respectables.


Première chose à savoir sur la violence sexuelle sur mineur est qu’elle n’est pas rare. Aucune famille comorienne n’est épargnée. Vous qui lisez ces lignes êtes concernés. Si ce n’est vous, vos enfants, vos parents, vos cousins, vos amis. Ils sont concernés. Je vous pose la question, sur tous les cas dont vous avez eu vent, combien ont été publiquement dénoncé? La plupart du temps, on ne dit rien pour ne pas troubler la paix des familles.

Deuxième chose à savoir, ce n’est jamais ce qu’on croit. On pense que c‘est un acte d’une telle cruauté que seuls des monstres psychopathes cornus peuvent le perpétrer. Cela rend difficile d’accepter qu’une personne que l’on aime puisse être pédophile. Alors on doute, on questionne, on temporise, on trahit la confiance qu’une victime place en nous quand elle dénonce son agresseur. Pourtant, nous avons le devoir de croire la parole des victimes.


Quand à la violence de la justice pénale, peu clémente envers les victimes, vient s’ajouter la violence d’une justice coutumière qui vient exonérer les coupables de toute conséquence sociale, on envoie un message social d’impunité. Nous savons tous les raisons derrière cette solidarité derrière les agresseurs sexuels.
Mais tôt ou tard, on exposera et dénoncera chacun de leur agissement et nous mettrons tout en œuvre pour les empêcher de nuire.


Biheri

Commentaires