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Véhicules hors d’usage à Ngazidja : une menace environnementale ignorée

Véhicules hors d’usage à Ngazidja : une menace environnementale ignorée

Société | -   Nazir Nazi

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À Ngazidja, l’accumulation des véhicules hors d’usage transforme peu à peu l’île en bombe écologique : huiles toxiques, batteries usées et plastiques dégradés contaminent les sols, les nappes phréatiques et menacent directement les écosystèmes. Malgré les alertes, aucune solution durable n’est encore en place.

 

À Ngazidja, plus de 12 901 véhicules ont été officiellement enregistrés au cours des trois dernières années, selon les données de la direction régionale d’immatriculation. Mais derrière cette hausse du parc automobile se cache une réalité préoccupante : le nombre de véhicules hors d’usage (Vhu) et d’épaves disséminés un peu partout sur l’île reste totalement méconnu, faute de recensement officiel.Pourtant, ces carcasses sont visibles partout. Abandonnées dans les garages, le long des routes, sur les côtes, dans les champs ou parfois à quelques mètres des habitations, se détériorent lentement au fil des années avec la pollution qu’elles engendrent. Et cette dégradation n’est pas sans conséquences. Les batteries, huiles usagées, graisses, liquides toxiques ou plastiques comme le polypropylène s’infiltrent progressivement dans le sol, menaçant les nappes phréatiques, l’agriculture et, inévitablement, la santé publique.


Sur la route principale comme sur le site connu sous le nom de Piste de Moroni, les épaves s’accumulent. Certaines proviennent d’accidents, d’autres sont abandonnées après des pannes faute de moyens pour acheter des pièces de rechange. « Les propriétaires laissent leurs véhicules ici parce qu’ils n’ont pas les moyens de les réparer. On ne peut pas les garder indéfiniment, mais nous manquons de solutions. Les autorités doivent nous aider à nous en débarrasser », confie Eric Humblot, un propriétaire d’un garage installé depuis plus de 25 ans au nord de Ngazidja.

Seconde vie ou bombe écologique ?

En novembre dernier, la mairie de Moroni a annoncé une opération d’enlèvement des carcasses en état de délabrement ou obstruant la voie publique. Une décision qui faisait suite à une note émise en septembre, interdisant la collecte et l’exploitation de déchets métalliques sur la Piste de Moroni. Malgré ces mesures, le terrain reste inondé d’épaves, faute d’infrastructures de traitement. Pour les autorités municipales, ces véhicules abandonnés représentent toutefois un potentiel. « Les carcasses de la Piste de Moroni peuvent avoir une seconde vie. Nous espérons que des prestataires étrangers s’y intéresseront pour les recycler ou les valoriser », explique Aboubakar Mohamed, un agent de la voirie de la capitale.


De son côté, l’agence nationale de la gestion des déchets (Angd) affirme travailler sur plusieurs pistes. Son directeur général évoque la nécessité d’appliquer strictement certaines dispositions du code de la route afin de mieux contrôler les véhicules importés, souvent déjà en mauvais état. « Nous travaillons également sur un projet de traitement des déchets chimiques et dangereux, et nous étudions la possibilité d’exporter les Vhu et les épaves vers des pays prêts à les accueillir », souligne le patron de l’Angd, Oussoufa Mze. En attendant des solutions concrètes, les épaves continuent de s’entasser, transformant certains quartiers et zones naturelles en dépotoirs à ciel ouvert. Un risque écologique majeur qui nécessite une réponse coordonnée, durable et urgente.

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