La semaine dernière, une rencontre entre le ministre français de l’Intérieur et son homologue comorien a eu lieu en présence des ministres des affaires étrangères des deux pays. Contrairement au tête-à-tête secret d’Emmanuel Macron et Azali Assoumani, la réunion des ministres a donné lieu à un communiqué laconique qui ne révèle pas grand-chose. On sait seulement que les liaisons maritimes entre Mayotte et le reste de l’archipel vont reprendre sans plus de précisions.
Certains politiciens estiment, à tort ou à raison, que «le gouvernement comorien a perdu la rencontre», bien que des sources indiquent que les reconduites ne sont toujours pas autorisées.Le Front commun élargi parle de « trahison » sans vraiment y apporter des éléments d’appui. Elle accuse le chef de l’Etat de «violer l’article 23 de la Constitution», qui dispose qu’ «aucun Comorien ne peut être extradé ou expulsé de son pays ».
«Une position ambiguë»
L’ancien gouverneur de l’île autonome de Ngazidja, Mohamed Abdouloihab, parle d’un « recul fâcheux » qui a démoralisé l’opinion. «Après les dénonciations, la société civile qui est en première ligne dans cette lutte espérait que le gouvernement prendrait le relais. On ne s’attendait certes pas à des miracles, mais nous pensions qu’il parviendrait à annuler le visa Balladur. Au moins, que les Comoriens le prennent sur place. Mais cela n’a pas été le cas. Je suis dépité et déçu», a-t-il déclaré, rappelant que les ministres comoriens n’auraient pas dû se rendre chez l’ennemi pour discuter.
Le président de l’Alliance pour la sauvegarde des institutions (Apsi) était convaincu que la France ne lâcherait pas du lest sur ces trois points. «D’abord, elle veut réaffirmer sa souveraineté sur l’île comorienne de Mayotte, puis faire plaisir à l’opinion mahoraise en alimentant la thèse selon laquelle le salut ne viendra qu’après l’expulsion des Comoriens. Enfin, Darmanin, avec ses visées politiques, est déterminé à détruire les habitations pour ensuite se vanter d’avoir réussi à assainir l’île», a-t-il ajouté, étonné du changement de discours constaté lors des entrevues accordées à France 24 et Le Monde.
«La position du président Azali est ambiguë», regrette le chargé de communication du collectif Stop Wuambushu à Mayotte (Csum), Ali Said Achimo. Pour lui, la souveraineté d’un pays ne se discute pas. Il qualifie ensuite le communiqué sorti mardi à l’issue de la rencontre entre les deux délégations de « mascarade ». «Ils voulaient seulement apaiser les tensions. D’où l’usage des formules qui soulignent l’amitié liant les deux pays. Nous nous demandons maintenant ce que vont devenir les décisions prises par le gouverneur de Ndzuani. Azali Assoumani va-t-il le désavouer ou pas ?», s’interroge-t-il.
Pour sa part, le président du parti Ukumbozi, estime qu’il faut attendre pour voir si les bateaux vont transporter des refoulés ou pas. «Le communiqué est évasif. C’est peut-être une façon pour les français d’éviter de bousculer Azali qui, lui, craint plutôt les répercussions médiatiques», conclut Idriss Mohamed.