Quelle lecture faites-vous sur le réaménagement du nouveau gouvernement ?
C’est une équipe resserrée autour de la nouvelle vision du pays. Il s’agit d’un redéploiement pour plus d’efficacité et de pertinence dans l’exécution des politiques sectorielles de l’Etat. L’objectif est de recadrer les plans et les autres programmes pour répondre aux attentes de la population. L’urgence, à mon avis, demeure la mobilisation rapide des financements promis à l’issue de la Conférence des partenaires au développement (Cpad). Les membres du gouvernement sont à la hauteur de cet objectif.
Comment expliquez-vous le choix de Mze Abdou Mohamed Chanfiou au ministère des Finances ?
C’est un grand pilier de la Cpad aussi bien dans la préparation que dans l’organisation de cette grande conférence. Il est bien rodé pour avoir été au cœur même du dispositif technique. L’un des soucis majeurs du président de la République est la mobilisation des financements promis à Paris pour soutenir les politiques de développement. C’est un volet qui lui tient à cœur. Et, je crois que le ministre des Finances dispose des capacités techniques nécessaires pour la mobilisation de ces financements.
Trois mois après le dialogue inter-comoriens, où en est-on du suivi ?
Un excellent travail a été fait. Il fallait d’abord exploiter les recommandations et procéder au travail de synthèse. Il fallait savoir les recommandations qui peuvent faire l’objet de textes réglementaires et celles qui relèvent du cadre législatif. Ce travail a été fait. Les textes sous forme d’avant-projet de lois sont en cours de finalisation et seront transmis au bureau de l’Assemblée en vue de leur examen et leur adoption. Toutes les recommandations issues du Dialogue seront mises en œuvre. Le président y tient beaucoup sur ce point.
Un groupement de partis politiques d’opposition, réunis autour du Comred, a publié lundi une brochure qui ressemble à un projet de société alternatif du vôtre. Comment avez-vous accueilli une telle initiative ?
Je crois que c’est une démarche salutaire. Notre parti, la Crc, a toujours été ouvert au débat sur les grandes questions d’intérêt national. Il s’agit d’une démarche salutaire et digne d’une opposition républicaine. Que des politiques s’organisent et annoncent un projet d’avenir, cela nous réjouit encore davantage. Nous sommes très heureux de voir enfin des partis s’organiser avec sérieux. Et c’est ce que nous avons toujours encouragé. Le président de la République a toujours encouragé une meilleure organisation de notre écosystème socio-politique et veut que l’opposition politique joue son rôle dans l’élévation du débat démocratique. Il faut penser aux questions essentielles qui auront un impact positif direct sur la vie de nos concitoyens. Les questions de développement, de la vie, de l’avenir de notre jeunesse. Il faut des débats d’idées sur l’avenir du pays. Je félicite ces partis politiques et je les encourage à faire autant pour élever le niveau du débat politique et surtout de penser d’abord au pays.
Qu’en est-il du congrès de la Crc qui devrait avoir lieu au premier trimestre 2022 ?
Nous sommes en train de mettre en place les cellules et les coordinations régionales pour être beaucoup plus opérationnel sur le terrain. A Ngazidja, les coordinations de Mbadjini, Itsandra, Bambao et Hamahame ont été mises en place. Nous allons mettre en place celle de Moroni ce mercredi. A Mwali, les coordinations régionales ont été mises en place. A Ndzuani, les coordinations régionales seront en mises en place dans la semaine du 30 mai au 5 juin. Nous comptons bien organiser le congrès entre fin août et début septembre prochain pour une bataille démocratique en 2024 et 2025.
La Cour d’assises a bouclé sa session. Il y a eu deux personnes condamnées à mort, certaines à perpétuité et d’autres à plus de 20 ans de prison. Globalement, quels commentaires faites-vous sur ces procès tant attendus ?
Je crois que la population retiendra une seule chose : la justice pour les victimes. Les citoyens retiendront aussi le respect des engagements des autorités judiciaires à juger rapidement ces personnes dont leurs actes ont été d’une très grande cruauté. Il y a un an, les Comoriens souhaitaient que ces personnes poursuivies pour viols ou violences soient jugées. C’est aujourd’hui chose faite. Nous devons nous en réjouir. Le président de la République a posé les actes nécessaires notamment l’adoption d’un nouveau code pénal et les autres décrets d’application. En tant que chef de parti, je ne peux que saluer l’organisation de ces procès. Il ne faut pas oublier que c’est la deuxième vague de procès car il y a eu une première vague à Ndzuani. Je rends hommage au ministre de la Justice Djaé Ahamada Chanfi et profite pour saluer la promptitude et le professionnalisme de nos magistrats. Pour la première fois dans l’histoire, des audiences diffusées en direct pour permettre à la population de suivre avec transparence les débats. Nous saluons aussi les forces de sécurité qui ont joué un grand rôle dans l’organisation de ces deux premières vagues des procès.
Le pays fait face à une hausse terrible des prix des denrées alimentaires. Les mesures prises ne semblent pas produire l’effet souhaité sur le quotidien de la population. Qu’en dites-vous ?
Les Comores subissent les conséquences de nombreuses crises internationales. Mais avant, la Covid-19, il y avait le cyclone Kenneth qui a détruit toutes les récoltes, ce qui a donc engendré une baisse des produits vivriers dans les marchés. Puis, la crise sanitaire avec les nouvelles conséquences sur les importations et la crise du frêt à l’international. Aujourd’hui, nous subissons aussi les conséquences de la guerre en Ukraine. Le gouvernement et le président sont conscients de la situation. Et ils agissent. Des mesures ont été prises et des sacrifices ont été consentis. Par exemple, il y a eu une hausse des prix du pétrole partout dans le monde contrairement aux Comores où les prix ont été maintenus. Mais jusqu’à quand ? Le prix de l’essence en France, par exemple, est de 2,5 euros. Et pourtant le pays importe d’importantes quantités. Le prix devrait baisser car plus vous achetez d’importantes quantités, plus le prix baisse. A contrario, si vous achetez moins, le prix tend à augmenter. Or, le prix de l’essence est toujours maintenu dans notre pays à 1,5 euro. Mais pour combien de temps ? Seuls les techniciens peuvent répondre.
Vous parlez de mesures, lesquelles ?
Je veux parler des mesures ou des dispositions prises pour prévenir une situation compliquée. L’Etat perd, par exemple, environ 1,6 milliard de francs pour chaque cargaison de pétrole livrée. C’est un sacrifice consenti pour protéger la population.L’Etat perd aussi 800 millions de francs pour chaque cargaison de riz. C’est aussi un sacrifice. Mais est-ce que le pays pourrait tenir pour longtemps ? Il appartient aux autorités compétentes de répondre à cette question. Mais je sais que toute décision sera prise dans la concertation avec tous les acteurs concernés.
La structure des prix n’est pas respectée. L’inflation est devenue l’un des grands sujets de préoccupation. Quelles sont, d’après vous, les mesures immédiates à prendre ?
Je vous ai parlé des dispositions prises, notamment les sacrifices de l’Etat qui a décidé de perdre des milliards pour protéger la population durant ces années difficiles marquées par des multiples crises. Aujourd’hui, le plus important est l’augmentation de l’offre, faire en sorte à ce qu’il ne manque rien.C’est d’ailleurs l’objet de l’achat du bateau à 800 millions de francs arrivé hier au port de Moroni. Nous n’aurons pas désormais un souci de denrées ou une rupture du stock.
Les conteneurs qui seront bloqués à Dar es salam ou au port de Lingoni à Mayotte peuvent être acheminés facilement à Moroni grâce au bateau que nous venons d’acquérir. Il faut encourager la production locale.Le président de la République a fait son travail en mobilisant plus de 50 millions de dollars injectés dans les secteurs productifs, l’agriculture en particulier.Il y a le projet Pidc, d’autres projets soutenus par la France et d’autres partenaires au développement. Aux techniciens de faciliter l’exécution efficiente de ces projets et aux jeunes de saisir leur chance pour s’investir notamment dans l’agriculture et l’aviculture.