L’opposition a écrit au chef de l’Etat pour exprimer sa volonté de dialoguer. Mais elle a posé des conditions. Qu’en dites-vous ?
Je crois que c’est une bonne nouvelle, d’abord pour le pays et pour notre démocratie. Le président de la République a toujours été ouvert à tout dialogue constructif. Il sait bien que la vitalité de la démocratie dépend de la capacité de ceux qui sont dans l’opposition à privilégier le dialogue, le débat et la discussion autour des grandes questions nationales. Les invectives et les discours va-t-en-guerre n’apportent rien. C’est notre pays à tous, chacun a le devoir d’apporter sa contribution pour son développement et son rayonnement. Cette initiative est une bonne chose pour notre pays. La Crc en a pris acte et félicite la démarche du Front commun de l’opposition.
Et s’agissant des conditions préalables notamment de ce qu’ils considèrent comme «prisonniers politiques», la restauration des libertés collectives et individuelles ou encore la représentativité au sein de l’organe électoral ?
Les conditions seront examinées et des réponses seront apportées. Mais d’ores et déjà, une très bonne partie des conditions a été déjà satisfaite. Le cadre juridique électoral est déjà adopté et a pris en compte cette représentativité. Il y a eu un consensus préalable lors du dialogue inter comorien.Je rappelle que les représentants de l’opposition au sein de la Ceni auront toujours leur place. Il n’y a pas certes un groupe parlementaire de l’opposition à l’Assemblée mais la loi électorale a prévu «une opposition extraparlementaire». Tout cela pour assurer l’équilibre de représentativité.
L’opposition aura donc toujours ses délégués au sein de la commission. Maintenant, c’est à l’opposition de s’organiser en interne et de parler d’une seule voix. Je dois aussi rappeler que personne n’a le monopole de l’opposition dans notre pays. En ce qui concerne les libertés collectives et individuelles, il n’y a aucune disposition législative ou règlementaire qui restreint les libertés publiques.
Il y a des mesures de prévention de l’ordre public qui sont prises à chaque fois que cela s’avère nécessaire. Et cela entre dans le cadre des missions classiques de l’Etat. Mais personne n’est empêché d’aller et venir, personne n’est empêché de tenir une réunion. L’opposition organise régulièrement des rencontres politiques dans certaines régions. Je crois que ceux qui parlent des restrictions en matière de liberté entretiennent une fiction. Et je dis qu’il n’y a pas de prisonniers politiques. Il y a des personnes condamnées pour des délits de droit commun. Mais personne n’est emprisonné pour ses opinions. Le président va apprécier la démarche de l’opposition et prendra les mesures appropriées pour le bien du pays.
Après cette lettre de l’opposition, et la réponse du chef de l’Etat, qu’est ce qui doit être fait pour amorcer les discussions entre pouvoir et opposition sur ces questions techniques relatives aux échéances électorales ?
Comme je l’ai dit, le chef de l’Etat va donner des instructions en la matière. Et vous en serez tenus informés. Pour l’heure, nous ne pouvons que saluer cette démarche constructive de l’opposition. Je profite aussi pour rappeler que les textes déjà adoptés ont été élaborés avec l’appui des experts de l’Union africaine. Notre pays a adhéré au Mécanisme africain d’évaluation des pairs (Maep). Le cadre législatif, la gouvernance électorale et tous les instruments juridiques se rapportent à la vision de l’Union africaine.
C’est un grand pas en matière de transparence électorale. Rien n’empêche un ou plusieurs cadres de discussions mais l’essentiel est déjà fait. Le chef de l’Etat a toujours été animé par une bonne volonté d’associer tout le monde. Il a toujours prôné une approche inclusive dans tout sujet qui intéresse la vie de la Nation. C’est pourquoi justement, il a initié un dialogue entre tous les Comoriens pour que tout le monde puisse s’exprimer. Aujourd’hui, il n’y a pas une opposition parlementaire mais il y a une fenêtre qui permet toujours à l’opposition de se faire représenter à la Ceni.
Et en ce qui vous concerne, comment vous vous préparez à ces échéancesélectorales ?
Nous sommes sur le terrain depuis des mois. Nous mettons en place nos structures dans les communes. Nous y travaillons. Nous sommes presque en pré-campagne en attendant la convocation du collège électoral. Une chose est sûre : le 26 mai 2024, il y aura un président comorien qui aura à présider aux destinées du pays et qui n’aura pas surtout la double nationalité.
Les Comores assurent la présidence de l’Union africaine, comment avez-vous accueilli ce choix des Comores de diriger l’Afrique ?
C’est une grande fierté pour le pays. Je ne peux que féliciter le président et la sagesse de nos frères kenyans. Avec cette présidence, c’est tout le pays qui a gagné. Il faut mettre cette accession du président à la tête de l’Union africaine dans la patience et la persévérance observées ces dernières années. Il y a eu aussi un investissement personnel de sa part. Le président Azali Assoumani est l’un des fondateurs de l’Union africaine, d’abord en tant qu’acteur de la Déclaration de Syrte (en Lybie, ndlr) de 1999 qui va donner naissance à l’organisation.
Ensuite, par son feu vert lors de la conférence de Durban en Afrique du sud en juillet 2002 qui va officialiser la création de l’Union africaine. Et depuis, le président n’a cessé d’entretenir de bonnes relations avec les autres chefs d’Etat du continent. Je crois que c’est un retour sur investissement. Dieu récompense toujours les bonnes œuvres et ceux qui s’y mettent avec conviction et bonne foi. Notre pays est considéré comme un modèle grâce aux alternances démocratiques vécues ces 20 dernières années. Nous devons continuer à consolider les acquis démocratiques et s’atteler au développement socio-économique.
Le pays vit une crise sociale sans précèdent. La flambée des prix continue. Les citoyens souffrent et les mesures prises ne semblent pas apporter une réponse au calvaire quotidien des Comoriens. Qu’en dites-vous ?
Les autorités sont conscientes de cette situation qui nous touche tous. C’est pourquoi elles ont agi en prenant des mesures. L’Etat a procédé à la hausse de la valeur indiciaire, il y a eu des avancements accordés aux agents de l’Etat. Tout cela pour amortir le choc. Ce n’est pas suffisant mais ce n’est pas aussi rien car cela a un impact financier sur le budget de l’Etat.
Un fonds de 5 milliards a été mobilisé par l’Etat pour accompagner les opérateurs économiques. L’Etat a aussi acheté un bateau à hauteur de 800 millions de francs pour faciliter l’acheminement des produits. Des négociations sont en cours avec les armateurs pour multiplier le nombre de touchers. L’effet n’est pas ressenti mais des efforts ont été déployés. Il y a un travail à faire notamment le respect des structures des prix homologués. Et c’est un travail qui doit être mené par tout le monde y compris les consommateurs eux-mêmes. Les autorités font en tout cas le maximum pour assurer la disponibilité de tous les produits essentiels dans le pays, le gouvernent fait un effort pour qu’il n’y manque rien.
Malgré tout, c’est l’indifférence totale. Et c’est le citoyen qui en paie les frais, que faire ?
Il faut renforcer les mesures de contrôle des prix déjà fixés. Et ce n’est pas de la seule responsabilité des forces de sécurité, les citoyens ont eux-aussi leur part de responsabilité. Des mesures sont prises pendant ce mois sacré. Il s’agit notamment de la multiplication des foires agricoles pour concurrencer les revendeurs et aider à une baisse des prix des produits vivriers. De plus, nous vivons la période la plus poissonneuse. Et c'est une très bonne chose pour nous tous.
Des dispositions sont prises avec les maires, les préfets, les coopératives des pêcheurs et les responsables des chambres froides. Je dois préciser que les consommateurs ressentent les effets de l’inflation mais sont loin d’imaginer que ça aurait pu être pire si des mesures n’avaient pas été prises. L’inflation aujourd’hui frôle les 30 à 40% dans le monde, parfois même une hausse de 50%.
Chez nous, l’inflation est entre 10 et 20%, elle est la plus faible, comparée à celle des autres pays. Je ne peux pas bien sûr me glorifier de ce chiffre. Il s’agit surtout de montrer combien, le gouvernement déploie des efforts pour contenir l’inflation et accompagner la population dans cette crise qui touche toutes les économies du monde.