La déclaration du président à Dar-Najah, sollicitant un bilan de l’Accord-cadre de Fomboni, suscite de nombreux commentaires. Que répondez-vous à ceux qui y voient une remise en cause de la tournante en 2029 à Ndzuani ?
Il faut être clair : le président n’a jamais évoqué une quelconque remise en cause du principe de la tournante. Ce sont des fantasmes nourris par ceux qui manipulent l’opinion à des fins politiciennes. À Dar-Najah, le chef de l’État a simplement proposé d’engager une réflexion collective sur le bilan de l’Accord-cadre de Fomboni, dans le cadre du cinquantenaire de l’indépendance. L’objectif est d’évaluer notre modèle institutionnel, d’en identifier les forces et les faiblesses, et de voir comment le consolider pour renforcer l’unité nationale. Cette démarche est inclusive : le président souhaite que tous les acteurs politiques, la société civile et les institutions participent à cette évaluation, dont les conclusions seront partagées lors d’un forum national prévu en février 2026 à Fomboni. Ceux qui entretiennent une polémique savent très bien qu’ils déforment volontairement les propos. La tournante n’est pas remise en cause, et il n’a jamais été question de toucher à ce principe sans débat national.
L’Assemblée générale de l’Onu s’ouvre bientôt à New York. La question de Mayotte pourrait y être évoquée. Certains demandent sa réinscription à l’ordre du jour. Quelle est la position du gouvernement ?
La position des Comores est constante : Mayotte est comorienne et le restera. C’est un principe sacré, inscrit dans nos textes, notre histoire et notre engagement diplomatique depuis 1975. Toutefois, nous devons aujourd’hui conjuguer ce combat de souveraineté avec les réalités géopolitiques et humaines. La France est un pays ami, un partenaire stratégique. Nous avons plus du tiers de notre population qui vit en France, et une part importante de binationaux. Il est donc essentiel d’adopter une approche basée sur le dialogue, la diplomatie et le respect du droit international.
Comme je l’ai déjà affirmé dans d’autres occasions, la solution passe par un dialogue inclusif et constructif, qui prenne en compte les intérêts des deux nations. Le président Azali est attaché à ce principe, car c’est la seule voie réaliste et pacifique.
Mais le dialogue avec la France n’aboutit pas. Comment sortir de ce statu quo ?
Le statu quo n’est en effet pas satisfaisant. Mais ni les condamnations internationales, ni les déclarations unilatérales n’ont changé la situation. Il est donc impératif d’être à la fois ferme sur les principes et réaliste dans la méthode. Il faut continuer à rapprocher les peuples. Des initiatives culturelles, sportives et religieuses entre les trois îles et Mayotte sont déjà en cours. On le voit avec les jeunes Mahorais qui jouent pour l’équipe nationale, ou encore ceux qui participent aux festivités du Mawlid à Moroni. Ces signes sont porteurs d’espoir. Nous devons construire sur ce qui nous unit : la langue, la culture, la religion, les liens familiaux. Le gouvernement poursuivra cette stratégie de rapprochement humain tout en maintenant sa revendication sur la souveraineté.
Huit mois après l’installation des communes, peu d’actions concrètes sont visibles. Quel rôle doivent-elles réellement jouer ?
Les communes sont des acteurs clés du développement local. Elles doivent être le relais entre l’État et les citoyens, notamment dans la mise en œuvre des projets structurants du Plan Comores Émergent (PCE). Il est crucial qu’elles travaillent en synergie, notamment à travers des intercommunalités capables de porter des projets communs. Par exemple, des communes comme Mbadjini, Nyumakele ou Mledjelé peuvent unir leurs efforts autour de deux ou trois projets majeurs, structurants, et chercher ensemble des financements — que ce soit via les partenariats classiques ou la coopération décentralisée. Mais pour cela, il faut de la coordination, du leadership local, et un accompagnement renforcé de la part de l’État.
Quel est votre regard sur le déroulement des festivités des grands mariages cette année ?
C’est une satisfaction générale. Les festivités des grands mariages se sont déroulées dans le calme, la sécurité et la convivialité, ce qui n’est jamais acquis d’avance. C’est un signe de maturité sociale, mais aussi le fruit de mesures efficaces prises par le gouvernement. Le président et son gouvernement ont garanti la disponibilité des produits de première nécessité, des matériaux de construction, de l’énergie, et ont œuvré à la stabilité des prix. Le cadre de concertation public-privé instauré a porté ses fruits, tout comme le paiement régulier des salaires et l’avancement des agents de l’État, qui ont renforcé la sérénité sociale. Je tiens aussi à remercier la diaspora, qui reste un pilier essentiel de notre économie et de notre cohésion sociale. Il convient également de souligner l’excellent rôle joué par le Secrétaire général du Gouvernement, dont les efforts constants ont permis de maintenir un dialogue constructif et permanent avec les acteurs du secteur privé, contribuant ainsi à ce climat de confiance et de stabilité.
Le problème d’approvisionnement en eau persiste à Moroni. Quelles solutions sont envisagées ?
C’est un sujet prioritaire. L’approvisionnement en eau à Moroni reste insuffisant et irrégulier, et nous en sommes pleinement conscients. Le gouvernement a lancé plusieurs initiatives pour y remédier, en commençant par la création de mini-réseaux hydrauliques dans les régions les plus affectées, notamment à Ngazidja (Hamahame, Itsandra, Itsahidi…). Ces projets nécessitent des investissements importants, mais ils sont en cours. Le ministère concerné travaille également avec des partenaires techniques pour renforcer les capacités de stockage et moderniser le réseau existant. C’est un défi complexe, mais des réponses durables sont en préparation.
Le gouvernement annonce une révision des horaires de travail. Quelle est la logique derrière cette réforme ?
L’objectif est d’adapter notre administration aux standards internationaux, notamment en matière de productivité et de coordination avec nos partenaires. La plupart de nos partenaires extérieurs ne travaillent pas les samedis et dimanches. Il fallait donc réajuster notre calendrier de travail pour renforcer l’efficacité de l’action publique. Le président a souhaité une large concertation, impliquant les acteurs étatiques, la société civile, les notables et les religieux. Cette réforme des horaires de travail vise à améliorer la performance des services publics, la rigueur administrative et la visibilité de l’action gouvernementale. Un décret officiel viendra encadrer cette mesure, et les ministères devront s’y conformer strictement pour en garantir l’impact positif.