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Élections de 2024 I Débat autour de la nomination d’un directeur régional des élections

Élections de 2024 I Débat autour de la nomination d’un directeur régional des élections

Société | -

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Les juristes interrogés sont unanimes. Aucun texte n’aurai prévu sa nomination. Celle-ci poserait en outre la question du crédit pour payer le titulaire ainsi que ses attributions qui n’ont pas été précisées dans l’acte posé par le ministre. Un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur défendra, pour sa part, «le caractère légal» de l’arrêté, ajoutant que le nouveau code électoral a bien prévu «des compétences déconcentrées» dans les îles et que «la direction du budget a déjà alloué des crédits» en se fondant sur «un décret en la matière datant de la présidence d’Ikililou Dhoinine».

 

Le ministre en charge des élections, Fakridine Mahamoud, a nommé le 8 août un directeur régional des élections alors que le premier tour du scrutin présidentiel devrait se tenir en janvier. Une nomination qui a vivement fait réagir Latuf Abdou, ancien membre de la Commission électorale nationale indépendante et ancien député sur les réseaux sociaux. «En nommant des directeurs régionaux non prévus par la loi, le ministre de l’Intérieur viole et piétine la loi électorale du président Azali. Aux juristes de me prouver le contraire », a-t-il posté.


Al-watwan a donc interrogé deux juristes. «Cet arrêté viole manifestement les textes en rapport avec les élections. D’abord, plusieurs textes sont visés par le ministre, notamment les articles 84, 85, 86, 87,88 et 89 du code électoral. Or, aucun de ces articles ne lui donne le pouvoir de nommer des directeurs régionaux des élections », soutient Yhoulam Athoumani, docteur en droit public et fondateur du parti «Les nouveaux démocrates».


L’article 84 mentionné par l’arrêté et consulté par votre journal indique que «le ministre chargé des élections s’appuie sur la Direction Générale des Élections».
«Il me semble que le ministre fait une confusion entre directeur général des élections et directeur régional des élections. Les articles qu’il a visés parlent plutôt d’un directeur général des élections qui doit être nommé par un décret présidentiel», tranche notre interlocuteur. «Ensuite, poursuit Yhoulam Athoumani, étonnamment, le ministre se fonde sur «les nécessités de service» pour nommer le directeur régional des élections. Mais sur quel fondement ? Il n’y en a aucun», estime-t-il.
Le second juriste partage le même point de vue que Yhoulam Athoumani et va même un peu plus loin. « D’ailleurs, l’on peut logiquement se demander avec quels crédits le nommé sera payé, quelles en seront ses missions étant entendu que la structure n’est prévue nulle part. En outre, l’arrêté a omis de préciser les attributions de cette direction », a souligné cette source digne de foi, mais qui a requis l’anonymat.


L’ancien député Latuf prédit même un conflit présumé de compétences. «Si le ministère s’arrange pour créer des directeurs régionaux, il doit aussi leur attribuer des compétences or toutes les compétences en matière électorale sont déjà attribuées par le législateur, donc il doit les dénicher quelque part. Logiquement ce devrait être les Commissions électorales insulaires indépendantes (Ceii). Cet acte devrait instaurer un conflit de compétences au niveau des îles», croit savoir Latuf Abdou.
Les arguments avancés par l’ancien député Latuf Abdou et les deux juristes interrogés ont été contredits par le ministère de l’Intérieur en charge des élections. Un fonctionnaire défendra, bec et ongles, «le caractère légal» de l’arrêté, ajoutant que le nouveau code électoral a bien prévu «des compétences déconcentrées» dans les îles. «L’existence d’une direction générale des élections ouvre logiquement la voie à l’introduction et à l’opérationnalisation des directions régionales pour faire le relais dans les îles conformément à la coutume administrative».


Notre source a appelé ceux qui dénoncent «l’illégalité» de l’acte à saisir le tribunal administratif. «Ça ne suffit pas de palabrer. Le ministère attend que l’acte soit attaqué, il va se défendre. Le ministère travaille avec des juristes qualifiés et professionnels. L’arrêté est plus que légal. Et je mets au défi quiconque prouvera le contraire», a dit notre source.La même source ajoute que le nouveau code électoral a bel et bien prévu «des compétences déconcentrées» dans les îles et que «la direction du budget a déjà alloué des crédits» en se fondant sur «un décret en la matière datant de la présidence d’Ikililou Dhoinine» avec une direction générale des élections et une existence des directions régionales » dans les îles.


La source interrogée cite, entre autres, l’article 9 du décret N°14-128/Pr qui prévoit que le directeur général des élections est nommé par décret mais épaulé «par des directeur régionaux nommés par arrêté du ministre» en charge des élections.La même source ajoute : «Ceux qui contestent l’arrêté n’ont qu’à l’attaquer, c’est simple. Et je les mets au défi, ils auront tort. Ça ne sert à rien de dire que c’est illégal ou ce n’est pas légal. Que ceux qui estiment que l’arrêté est légal l’attaquent devant le tribunal administratif, c’est tout. L’arrêté ne souffre d’aucun problème de légalité».

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