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Énergie et eau I Enfin, une autorité nationale de régulation

Énergie et eau I Enfin, une autorité nationale de régulation

Société | -   Nazir Nazi

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Après huit années d’attente, l’État passe enfin à l’action. Une autorité de régulation indépendante des secteurs de l’énergie et de l’eau devient opérationnelle, promettant de faire entendre la voix des usagers face à des opérateurs souvent jugés intouchables.

 

C’est un tournant historique dans la gouvernance des services essentiels. Huit ans après les assises nationales sur l’énergie, la promesse d’un arbitre dans les secteurs de l’eau et de l’énergie devient réalité. Le décret n°25-047/PR du 15 octobre 2025 officialise la nomination de Saïd Mohamed Nassur comme premier directeur général de l’autorité de régulation, une institution attendue par les consommateurs et les acteurs économiques. Avec la création de cette institution, « un juge » est enfin désigné dans un secteur sous tension.Les griefs des usagers contre les fournisseurs d’eau, d’électricité et des hydrocarbures sont nombreux. «Factures jugées opaques, tarifs inadaptés au pouvoir d’achat, contrats passés sans transparence, mais aussi l’opacité dans la gestion du dossier du pétrole comorien, ou la qualité des produits pétroliers parfois critiquées», entre autres. En tout cas, pour les consommateurs, l’arrivée de cette autorité répond à une nécessité urgente. Celle de rééquilibrer les rapports de force dans deux secteurs en pleine transition, où on ne laisse que peu de place à la protection du consommateur.


Jusqu’ici, aucun organe n’avait la compétence légale pour trancher les litiges, contrôler les pratiques ou sanctionner les abus. Ce vide institutionnel est désormais comblé. Il s’agit d’une institution aux pouvoirs étendus. Créée par le décret n°25-124/PR du 6 juin 2025, l’agence de régulation n’a pas pour unique mission d’arbitrer. Elle détient des pouvoirs exécutoires. Elle peut ainsi délivrer, suspendre ou révoquer des licences, fixer les barèmes tarifaires, approuver les redevances, et même prélever des échantillons lors d’enquêtes techniques avec l’appui du bureau géologique national.


«L’agence de régulation est chargée de réglementer les activités exercées sur le territoire national dans les secteurs de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement. Elle a le pouvoir de prendre des décisions exécutoires pour régler les différends entre les opérateurs eux-mêmes et les consommateurs conformément aux règles de procédure adoptées et publiées par l’agence de régulation», laisse comprendre ledit décret. Cette autorité est aussi chargée de protéger les consommateurs vulnérables, notamment ceux à faibles revenus, en situation de handicap, ou vivant dans les zones rurales trop souvent marginalisées dans les politiques énergétiques et de l’eau.
L’actualité récente justifie l’urgence de son entrée en fonction. Le contrat de partenariat entre la société nationale de l’électricité (Sonelec) et le groupe français Innovent, pour un projet d’énergie solaire suscitait critiques et inquiétudes par le consommateur. Avec l’autorité désormais en place, ce type d’accord ne pourra plus échapper à l’examen d’un organe indépendant.

«Un chantier immense»

De son expérience comme secrétaire général adjoint du ministère en charge de l’énergie et cadre supérieur au sein de la direction générale des énergies, des mines et de l’eau, Saïd Mohamed Nassur devra désormais faire preuve d’autorité, d’équilibre et d’écoute. Il hérite, selon lui, d’un chantier sensible, sur fond de transition énergétique, d’ouverture du marché et de tensions sociales liées à la précarité énergétique.L’opérationnalisation de cette agence de régulation marque une étape décisive vers plus de transparence, de justice et de professionnalisation dans deux secteurs cruciaux pour le développement du pays. Mais encore faut-il qu’elle ait les moyens humains, techniques et financiers pour agir, car plus qu’un décret, c’est une volonté politique constante qu’il faudra, pour que cette autorité ne reste pas une coquille vide.

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