À peine de retour d’un voyage qui l’aura mené en Inde et en Arabie Saoudite que le chef de la diplomatie comorienne, Souef Mohamed El-Amine, a tenu une conférence de presse, samedi 17 mars, à la salle de conférence du ministère des Affaires étrangères. Il s’est étalé principalement sur la situation qui prévaut, depuis quatre semaines, sur l’île comorienne de Mayotte. Les problèmes récurrents d’insécurité ont en effet déclenché une contestation sociale dans l’île, laquelle a conduit à une grève générale et à l’installation de barrages routiers dans les différentes localités de l’île.
Lire aussi : Mohamed Daoudou : “l’insécurité à Mayotte n’est pas causée par les comoriens des autres îles”
Cette conférence de presse est la suite, dit-il, des réunions déjà organisées par le ministre de l’Intérieur sur la question et des rencontres initiées par le président de la République depuis l’étranger. Souef Mohamed El-Amine a rappelé que les Comores ont sollicité, depuis longtemps, un “dialogue politique franc” avec la France sur cette question, conformément aux souhaits de certains hommes politiques français, à l’exemple de
Giscard d’Estaing, qui avait déclaré, en 1974, que ce n’est pas une vocation française que de chercher à diviser des îles que la culture, la langue et l’histoire réunissent. Il citera également François Mitterrand, lors de sa visite aux Comores en Juin 1990, qui avait affirmé que c’est de la responsabilité de la France que d’œuvrer pour le rapprochement entre Mayotte et ses îles sœurs.
“Malheureusement l’administration française n’a pas suivi ces injonctions”, regrette-t-il. Souef Mohamed El-Amine a rappelé que l’un des sujets qui a été abordé lors de sa rencontre, le 12 septembre 2017, avec le ministre des Affaires étrangères français, en marge de l’élaboration de la feuille de route, est celle des enfants abandonnés dans la rue, un “comportement qui n’honore pas la France. Un pays qui se bat pour les droits de l’homme, les droits des enfants, qui contribue à l’Unicef”.
Il s’offusque que la France expulse les parents et laisse les enfants seuls, sans éducation, construisant ainsi le “nid de la délinquance”.
Ils disent que l’insécurité provient de ces enfants. Ces enfants avaient des parents pour les surveiller et ils ont été condamnés à errer. La France a manqué de vision, incrimine-t-il.
Revenant sur la commission mixte Comores-France, il a déclaré que la feuille de route a été suspendue sur la demande des élus mahorais, sans que le gouvernement comorien ne soit notifié de cette suspension, sachant que “la feuille de route consistait justement à prévenir ce genre de choses”.
Saisir la communauté internationale
Il avance que “les Comores ont honoré leurs engagements. La France non. La situation a dépassé maintenant l’État français et les élus mahorais et a atterri aux mains de l’Intersyndicale et à la rue. Qui gouverne Mayotte en ce moment ?”.
Il prévient que “tout ce qui arrivera aux citoyens comoriens à Mayotte, quel que soit leur île d’origine, est de la responsabilité de la France”, et que la communauté internationale est là pour veiller.
Nous sommes pour un dialogue politique mais s’ils veulent la confrontation, nous sommes prêts à faire face, à saisir la communauté internationale, la Ligue arabe, l’Union africaine, les Nations unies, met-il en garde.
Souef Mohamed El-Amine s’étonne que la situation ait empiré, après le départ de la ministre des outre-mer, Annick Girardin. Il demande ainsi à la France de communiquer les résultats des discussions engagées avec l’Intersyndicale. Prenant l’exemple du calme qui règne sur les autres îles, il affirme que
ce qui se passe à Mayotte prouve l’échec de la France. L’administration française à Mayotte est temporaire. Elle sait pertinemment que l’île ne lui appartient pas. Que la France vide les lieux et nous remette les clés.
À Mansour Kamardine, il répond que “c’est son droit de réclamer la nationalité française mais que l’île, autant sur le plan historique que du droit international, ne lui appartient pas”.
Enfin, s’agissant des expulsions, le chef de la diplomatie comorienne, laisse entendre qu’il est hors de question que des Comoriens soient expulsés de Mayotte et renvoyés sur les autres îles des Comores. “Rien ne se fera sans l’État comorien”, rappelle-t-il, affirmant avoir sollicité un entretien avec les autorités françaises dans les meilleurs délais.