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Il y a 29 ans, le père de l’indépendance des Comores tombait sous les balles des mercenaires

Il y a 29 ans, le père de l’indépendance des Comores tombait sous les balles des mercenaires

Société | -   Mohamed Soilihi

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Le contexte et les circonstances de la mort du président Ahmed Abdallah Abderemane demeurent et demeureront toujours un mystère. Assassiné à l’âge de 70 ans, la trentième commémoration de sa disparition, l’année prochaine, coïncidera avec son centenaire.

 

Vingt-neuf ans viennent de s’écouler depuis qu’Ahmed Abdallah Abderemane tombe sous les balles des mercenaires. Le père de l’indépendance et premier président de la République fédérale islamique des Comores a été assassiné dans sa résidence de Beit-Salam par les responsables de sa propre garde rapprochée, la tristement célèbre Garde présidentielle (Gp), dirigée par le mercenaire français Bob Denard. Dans cette nuit du 26 au 27 novembre 1989, son garde du corps, Jaffar Abdallah, a également trouvé la mort.
Le contexte et les circonstances de la mort du président Ahmed Abdallah Abderemane demeurent et demeureront, un peu moins de trois décennies après, toujours flous et troublants car le procès contre le soldat de fortune, à la cour d’assises de Paris en mai 1999, a été un mystère complet. Au bout de quatre heures de délibérés, les jurés ont estimé que les accusés n'étaient pas coupables. Ce jour-là, Robert ou Bob Denard et Dominique Malacrino sont sortis libres du tribunal sous les cris et les huées d'une centaine de Comoriens scandant : "Assassins! Honte à la France!"


On ne saura jamais un jour ce qui s'est réellement passé dans le bureau du président et pourquoi trois mercenaires armés de Kalachnikov sont montés lui demander de signer une lettre. Sans doute car les jurés ont estimé que cette incertitude ne suffisait pas à rendre Denard et Malacrino coupables d'assassinat.

Plutôt mourir que de signer

Salim Abdallah, fils de la victime, avait aussi refusé à l'audience de charger les mercenaires. Mystère.
Ancien sénateur de la Vème République, élu et réélu au Sénat français respectivement le 26 avril 1959 et le 22 septembre 1968, Ahmed Abdallah Abderemane démissionne le 9 janvier 1973 et devient président du Conseil de gouvernement des Comores, à la suite du succès du parti Vert aux élections locales de décembre 1972. C’est lui qui conduisit la délégation comorienne, à Paris, aux négociations des Accords du 15 juin 1973, avec le gouvernement français, qui ouvrent la voie à l’indépendance des Comores.

Une indépendance
unilatérale en 1975

Notamment la consultation populaire du 22 décembre 1974, à travers laquelle 95% des Comoriens de l’ensemble des quatre îles de l’archipel se prononcent pour l’indépendance contre 65% de «non» à l’indépendance enregistrés seulement à Mayotte.
Ripostant contre la décision de la France, outrepassant les règles du droit international, de garder Mayotte sous l’administration française, Ahmed Abdallah Abderemane proclame unilatéralement l’indépendance le 6 juillet 1975 et devient le premier chef d’Etat des Comores indépendantes.


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Son pouvoir sera déposé, moins d’un mois plus tard, le 3 août 1975, par un coup d’Etat organisé par Ali Soilihi aidé par le mercenaire français Bob Denard. Le président déchu prendra le chemin de l’exil en France.


Bénéficiant des services du même affreux français, Ahmed Abdallah Abderemane reconquerra le pouvoir le 13 mai 1978 et élu, seul candidat en lice, président de la République fédérale islamique des Comores, le 23 octobre de la même année. Il installe, dans la foulée, un pouvoir autocratique en dissolvant tous les partis politiques pour faire une large place à son parti unique, l’Union comorienne pour le progrès, et demeure le candidat unique réélu le 30 septembre 1984. Son parti remporte la totalité des sièges à l’Assemblée fédérale le 22 mai 1987.

La fin du verrou
des mandats présidentiels

Deux ans plus tard, le 5 novembre 1989, les comoriens ont été appelés à autoriser, par voie référendaire, le président à se représenter pour un troisième mandat de six ans, en sautant ainsi le verrou de la limitation des mandats à deux. Il a été déclaré que 92,5% des électeurs avaient approuvé cette réforme. Mais le pays, sous la coupe des mercenaires, voit la corruption se développer de façon considérable. C’est trois semaines après le référendum, dans un moment de vives tensions opposant Bob Denard et Ahmed Abdallah Abderemane, que, le 26 novembre 1989, ce dernier meurt d’une rafale de pistolet-mitrailleur en présence du chef mercenaire. Le lendemain de sa mort, le 27 novembre 1989, Saïd Mohamed Djohar, alors président de la Cour suprême, prend la tête d’un gouvernement provisoire.
Né le 12 juin 1919 à Domoni-Ndzuani, aux Comores, Ahmed Abdallah Abderemane est assassiné à l’âge de 70 ans. La trentième commémoration de sa disparition, l’année prochaine, coïncidera avec son centenaire.


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